12 Years a Slave

Où est le grand film qu’on nous promettait ? Heureusement que Chiwetel Ejiofor est là pour sauver un peu la mise. ♥

Un afro-américain libre est kidnappé par des vendeurs d’esclave. Il mettra 12 ans à retrouver sa liberté.

Prix du public à Toronto, 12 Years a Slave, le nouveau film de Steve McQueen, le surestimé réalisateur du longuet Hunger et de l’insupportable Shame, est parmi les films les plus attendus de l’année et par le fait même, en sera l’une des plus grande déception.

Réalisation convenue, récit linéaire et sans surprise, rien de ce film ne le diffère des Lifetime Movies qui sont télédiffusés l’après-midi, sauf quelques scènes violentes relativement crues. C’est là que se joue la réputation de Steve McQueen, dans cette crudité des scènes, les scènes à la prison de Hunger, les scènes de sexe dans Shame et maintenant les scènes de martyrs. En fait, c’est Jacques Rivette qui, dans un magnifique texte sur l’abjection au cinéma (en se référant à Kapo de Gillo Pontecorvo), résume le mieux le sentiment de grossièreté que nous laisse le nouveau film de McQueen:

«Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il est difficile, lorsqu’on entreprend un film sur un tel sujet (les camps de concentration), de ne pas se poser certaines questions préalables; mais tout se passe comme si, par incohérence, sottises ou lâcheté, Pontecorvo avait résolument négligé de se les poser. Par exemple, celle du réalisme : pour de multiples raisons, faciles à comprendre, le réalisme absolu, ou ce qui peut en tenir lieu au cinéma, est ici impossible ; toute tentative dans cette direction est nécessairement inachevée («donc immorale»), tout essai de reconstitution ou de maquillage dérisoire et grotesque, toute approche traditionnelle du « spectacle » relève du voyeurisme et de la pornographie. Le metteur en scène est tenu d’affadir, pour que ce qu’il ose présenter comme la « réalité » soit physiquement supportable par le spectateur, qui ne peut ensuite que conclure, peut-être inconsciemment, que, bien sûr, c’était pénible, ces Allemands, quels sauvages, mais somme tout pas intolérable, et qu’en étant bien sage, avec un peu d’astuce ou de patience, on devait pouvoir s’en tirer. En même temps, chacun s’habitue sournoisement à l’horreur, cela rentre peu à peu dans les mœurs, et fera bientôt partie du paysage mental de l’homme moderne ; qui pourra, la prochaine fois, s’étonner ou s’indigner de ce qui aura cessé en effet d’être choquant ? » (Jacques Rivette,  Cahiers du cinéma, no. 120, juin 1961)

Mettions tout de même à Chiwetel Ejiofor, formidable acteur britannique, qui malgré un incroyable talent, semble peiner à se faire reconnaitre comme l’un des acteurs les plus talentueux de sa génération. En dépit du manque de qualités cinématographiques du film, il ne serait pas étonnant qu’il décroche finalement sa première nomination à l’Oscar du meilleur acteur cette année, voir même le remporter. En fait, le film semble manufacturé pour remporter des oscars, parce que l’académie adore ce genre de film, ces reconstitutions historiques à la réalisation d’un classicisme dérisoire et «abjecte».

 

 

Laurent

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