Relatos Salvages, la vengeance dans ses plus beaux habits! ♥♥♥½
L’inégalité, l’injustice et l’exigence auxquelles nous expose le monde où l’on vit provoquent du stress et des dépressions chez beaucoup de gens. Certains craquent. Les Nouveaux sauvages est un film sur eux.
Vulnérables face à une réalité qui soudain change et devient imprévisible, les héros des Nouveaux sauvages franchissent l’étroite frontière qui sépare la civilisation de la barbarie. Une trahison amour, le retour d’un passé refoulé, la violence enfermée dans un détail quotidien, sont autant de prétextes qui les entraînent dans un vertige où ils perdent les pédales et éprouve l’indéniable plaisir du pétage de plombs.
En nomination pour la Palme d’Or à Cannes l’année dernière, Les nouveaux sauvages (Relatos Salvages) du réalisateur argentin Damian Szifron avait très peu de chances contre le prodigieux Winter Sleep de Nuri Bilge Ceylan ou bien contre le brillant Mommy de Xavier Dolan. Il fût néanmoins amusant de voir à quel point ce dernier projet constitué de plusieurs sketchs du réalisateur argentin se détachait du lôt des films en compétition par son côté baroque et complètement éclaté. Au travers d’une série de six sketchs à l’humour noir et extrêmement grinçant, Relatos Salvages présente ses héros au moment où ils franchissent la limite qui sépare la civilisation de la barbarie. Victimes d’injustices, d’inégalités ou simplement au mauvais endroit au mauvais moment, ces personnages pètent un plomb, littéralement, menant certains en prison et d’autres à une mort immédiate. Mais c’est intéressant de voir à quel point le ces histoires sont mises en scène à la fois de manière intelligente et à la fois complètement décalée. Mais au fond, les «héros» de ce film font ce que nous n’oserions pas faire. Ils franchisent cette fameuse limite entre ce qu’on voudrait bien faire, dans nos pensées les plus sombres, et ce que nous faisons.
Ils sont bien sûr dans des situations souvent extravagantes et loufoques comme dans l’histoire d’ouverture, lorsque tous les passagers d’un avion se rendent compte qu’ils ont été piégés par le type qui a décidé de se venger de tous les gens qu’il détestait. Il fait donc s’écraser l’avion! Cette situation complètement farfelue donne le ton au film, un ton absurde et intelligent, mais surtout drôle, parfois hilarant. Dans un autre sketch, un homme épuisé de payer encore et encore se venge du centre de remorquage de la ville en le dynamitant, devenant presque illico Bombita, le nouveau héros de la ville, applaudi même par ses nouveaux comparses de prison. Ou bien ces deux hommes qui se battent à morts sur le bord d’une route désertique, guidé par un orgueil malsain ainsi qu’une hargne animale. Et au bout du compte, que ces histoires finissent bien ou mal, qu’elles soient drôles ou dramatiques, elles racontent toutes l’histoire d’une vengeance. Le pardon étant un concept complètement impossible pour eux. Et de ces histoires se dégage un individualisme terrible, derrière ces situations souvent impossibles mais drôles se cachent le drame d’une société, la tragédie d’une époque. Bref, soutenue d’une musique puissante ainsi que d’un visuel impeccable, presque irréprochable, Les nouveaux sauvages trouve la façon la plus séduisante de nous amener cette réflexion, l’humour noire, grinçante !
Auteur: Simon Plante