Canada, 2024
★★★1/2
Dans Ninan Auassat : Nous, les enfants, Kim O’Bomsawin donne la parole aux jeunes
autochtones pour qu’ils racontent leur vécu. Ce documentaire ne se limite pas à montrer des histoires personnelles : il met en avant les défis, les rêves et la force de cette génération qui cherche à préserver son identité culturelle tout en construisant son avenir. À travers ces récits sincères et poignants, le film dessine un portrait intime de la jeunesse autochtone et de son rapport à la tradition, à la famille et au futur.
L’originalité du film vient du fait que seuls les enfants parlent, directement face à la caméra. Grâce à des plans fixes et une mise en scène sobre, le spectateur est plongé dans une écoute attentive et respectueuse. En choisissant de ne pas ajouter de voix off ou de commentaires extérieurs, Kim O’Bomsawin laisse toute la place aux témoignages des jeunes, renforçant ainsi leur authenticité. Cette approche immersive invite le spectateur à se concentrer uniquement sur les émotions et les réflexions des enfants, établissant un dialogue silencieux mais puissant entre eux et le public.
Vis-à-vis de ces jeunes, Ninan Auassat agit comme un miroir : on y voit leur réalité et les questions qu’ils se posent sur leur place dans leur communauté. Ils expriment à la fois leur fierté d’appartenir à leur culture et leur envie de rompre avec les traumatismes du passé. Ce mélange entre tradition et changement est au coeur du film. En partageant leurs espoirs et leurs incertitudes, ces enfants deviennent des symboles d’une génération qui porte en elle une double transmission : celle de ses racines et celle future, de son avenir à écrire.
Visuellement, Ninan Auassat mise sur la simplicité pour mieux toucher le spectateur. Les plans longs et fixes captent avec émotion les visages et les paroles des enfants. Les paysages naturels et les espaces urbains des communautés autochtones servent de décor à ces témoignages, rappelant ainsi l’importance du territoire dans leur identité. Ce contraste entre les récits personnels et la grandeur des terres autochtones renforce la profondeur du film. Les éléments visuels sont soigneusement choisis pour créer une atmosphère à la fois intime et universelle, où l’espace et la parole se conjuguent harmonieusement pour exprimer la richesse de la culture autochtone.
En plus de sa force narrative, le film joue un rôle pédagogique. Pour les spectateurs qui ne sont pas autochtones, il représente une belle occasion de découvrir une culture souvent méconnue. Plutôt que d’essayer d’universaliser ces expériences, Ninan Auassat permet de mieux comprendre les réalités spécifiques des jeunes autochtones aujourd’hui. Il met en lumière leurs luttes et leurs aspirations sans jamais tomber dans le misérabilisme. Chaque témoignage est présenté avec dignité, permettant de dépasser les stéréotypes et d’accéder à une compréhension plus nuancée des enjeux auxquels font face ces communautés.
En cela, ce film est une oeuvre qui informe, questionne et met en lumière des voix essentielles. Il invite à la réflexion et à l’ouverture, soulignant combien il est important d’écouter et de reconnaître la parole des jeunes autochtones. Plus qu’un simple documentaire, Ninan Auassat est un pont entre générations et cultures, un appel à l’empathie et à la transmission du savoir. Kim O’Bomsawin réussit à capter l’essence de cette jeunesse en quête de sens et d’appartenance, offrant un regard sincère et respectueux sur une réalité souvent ignorée du grand public.
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Durée : 1h31
Crédit photos : Office national du film du Canada