Pour sa seconde réalisation (après Laurentie avec Simon Lavoie), Corbo, Mathieu Denis souhaite évoquer l’histoire du Québec quelques années avant la crise d’Octobre. Une réalisation soignée et sobre pour un sujet délicat et important. ♥♥♥½
Dans les premiers mois de 1966, Jean Corbo change d’école. L’adolescent de 16 ans d’origine italienne qui habite dans une famille francophone aisée de Montréal s’est fait renvoyer de sa précédente institution scolaire. En révolte contre son père et son milieu, il se lie d’amitié avec deux jeunes militants d’extrême gauche de son âge. De fil en aiguille, le trio embrasse les idéaux du Front de libération du Québec, étant impliqué dans leurs actions qui peuvent prôner la violence. Lorsqu’un tragique événement survient, chacun doit évaluer son engagement. Que sont-ils prêts à faire pour améliorer la cause du Québec et de ses travailleurs?
Avec un synopsis et un film d’époque tel que celui-là, le lien avec la politique actuelle serait forcément fait et plus vite qu’on ne le pense. Pourtant, si le réalisateur se défend d’avoir fait un militant pour essayer de livrer une partition nuancée, il convient de confirmer que le film transpire la quête d’appartenance, d’identité. Même au travers les yeux de cet adolescent mi- italien mi- québécois, la question de la souveraineté fait plus qu’être posée. En outre, la présence au combien silencieuse de la grande Marie Brassard en mère dévouée confirme d’autres éléments d’époque (le poids de la domination masculine dans la culture italienne)… Tout est là pour composer un film sans fausse note avec une direction artistique réussie et des questionnements ici et là dans le scénario (ou des avis, dépendant du point de vue où l’on se place)
Au niveau de la réalisation, peu à dire si ce n’est qu’elle empreint, bien souvent, un classicisme assez formel pendant une bonne partie du film. Seul facétie du réalisateur, une mise en abîme incroyable lors du dernier quart d’heure et qui porte tout son sens dans l’issue finale.
En dehors de cet instant magique, la réussite principale de Mathieu Denis consiste en sa direction d’acteurs, tous jeunes et modernes et dont il réussit à obtenir un jeu sobre et hautement crédible.
Corbo réussit là où La maison du pécheur échouait (le film d’Alain Chartrand semblait vouloir contenter tout le monde). Sans fausse note ni peur d’être pointé du doigt par une fraction de la population, Mathieu Denis livre un film engagé.
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