Nope : Un néo-western épique

États-Unis, 2022
Note : ★★★★

Pour une troisième fois, le réalisateur américain Jordan Peele secoue l’industrie avec un film original, déstabilisant et entrainant. Dans toute sa complexité, Nope réussit à raconter une histoire classique d’horreur, à saveur de western spaghetti.

Après le succès de son premier film à la réalisation, Get Out (2017), thriller psychologique teinté de science-fiction, et de la réussite de son deuxième film, Us (2019), un thriller tout aussi psychologique, Peele propose ici un récit épique d’une plus grande échelle.

Se déroulant sur un ranch aux États-Unis, l’histoire met en scène Otis « OJ » Haywood Jr., joué par un habitué de Jordan Peele, le talentueux Daniel Kaluuya et Emerald « Em » Haywood (Keke Palmer), deux frères et sœurs qui sont rapidement témoins de phénomènes hors de l’ordinaire. Un duo qui sera accompagné, durant le film, des acteurs Steven Yeun et Brandon Perea.

Si cette prémisse, d’une localisation isolée dans le désert, ébranlée par des manifestations étranges, ressemble beaucoup aux récits conventionnels d’horreur, Nope dément rapidement cette idée en se l’appropriant. À même son titre, qui est une expression familière ironique, le film est une satire du thriller américain traditionnel.

Jordan Peele se sert des codes et des situations classiques du genre pour ensuite les retourner sur eux-mêmes et les enjamber pour réussir à les développer au-delà de ces limites conceptuelles. Par exemple, à quelques reprises, au lieu de fuir à découvert et ultimement de se faire capturer par l’ennemi, comme le font d’innombrables films du genre, les personnages de Nope prennent rapidement l’initiative de se cacher ou réussissent à déjouer facilement ce dernier.

Si certains de ces clichés du film d’horreur sont souvent recyclés par hommage au genre, il est tout de même rafraichissant de voir de nouvelles alternatives au cinéma. En fait, cette itération d’un « film de peur » est plutôt un amalgame bien unique de différents genres et sous-genres. Sans révéler trop de l’intrigue, dont la découverte mérite à elle seule d’aller expérimenter ce film au cinéma, la science-fiction et le néo-western (film de western moderne) y détiennent également une place centrale.

Dès le début du film, une tension mystérieuse pour l’inconnu, à la Close Encounters of the Third kind (1977), plane au-dessus de la vie des personnages principaux. Comme toute science-fiction, cette intrigue finit par être levée et les engrenages sont révélés et quasi expliqués. Par contre, arrivant au milieu du film, ce dénouement n’est que l’ouverture à une nouvelle péripétie qui détourne complètement le ton et le sujet de l’intrigue.

Si la première partie du film joue avec les thèmes de l’horreur et du thriller de science-fiction, la deuxième partie jongle avec de nouveaux thèmes d’aventure, de vengeance et d’avidité et tombe directement et de manière étonnement organique, dans le style néo-western.

Avec des scènes de paysages désertiques à couper le souffle, accompagnées d’une trame sonore très bien choisie, d’une course poursuite à dos de cheval et d’une sélection singulière de plans rapprochés, l’expérience en est une d’inspiration Sergio Leone.

Divisé en cinq chapitres, le récit est quelques fois morcelé et les transitions sont parfois difficiles à saisir. Le résultat est que le développement des personnages est parfois coupé court et d’autres fois, tout simplement inexistant, avec peu de contexte. Toutefois, la chimie entre ces derniers et l’aide d’un scénario léger, mais naturel et franc, permettent aux personnages d’exprimer leur personnalité et leurs passions sans nécessairement avoir besoin d’un développement spécifique.

Dans ce dernier film, Jordan Peele est capable de déjouer son audience comme le faisaient Halloween (1978) ou Alien (1979) à l’époque de leur sortie dans les cinémas. Il est une intéressante et complexe réponse à la formule longtemps répétée du genre d’horreur.

Bande-annonce originale anglaise :

Durée : 2h15
Crédit photos : Monkeypaw Productions

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