Spike Lee, qui n’était que l’ombre de lui même depuis quelques temps, revient enfin au sommet de sa forme. ♥♥♥♥½
Depuis quelques années, les films de Spike Lee n’étaient pas de grandes réussites. Même pour les amoureux de son cinéma [groupe dont je fais partie], prendre la défense de Red Hook Summer fut une tache ardue. Et quand la nouvelle fut annoncée qu’il serait à la barre du remake de Oldboy, je ne m’attendais pas à grand chose, tant l’original a une aura mystique qui l’entoure.
Old Boy, version Chan-wook Park, sorti en 2003, avait été une véritable révélation pour tous. L’occident connaissant le cinéma japonais depuis Kurosawa et Ozu, depuis les premiers Zhang Yimou c’est le cinéma chinois qui s’est ouvert à nous et c’est par Oldboy que nous avons connu le cinéma sudcoréen. Les premiers films d’Hong Sang-soo, de Kim Ki-duk et de Bong Joon-ho, bien que présentés dans les grands festivals, n’avait pas eu une large distribution. Cela fait de Oldboy (le Rashômon de la Corée du Sud), par le fait même, un film charnière intouchable. Pour qu’un projet de remake ait une certaine valeur d’intérêt, il fallait que ce soit le réalisateur de l’original qui aille tourner le remake à Hollywood (comme ce fut le cas avec plusieurs films du cinéma d’horreur japonais) ou qu’un réalisateur de renom s’attache au projet (le remake de Rashômon, Outrage, fut réalisé par Martin Ritt, un réalisateur qui a eu de la difficulté à se faire reconnaitre artistiquement, il en résulte que malgré toute les qualités de son remake, jamais il ne fut pris réellement au sérieux)
Pour avoir revu Oldboy dernièrement, je peux vous affirmer qu’il fait parti des films qui vieillissent assez mal, ce qui rend l’idée du remake d’autant plus justifiable. La version de Spike Lee, reprend la même ligne narrative que l’original: un homme, Joe Doucett, est enfermé durant plusieurs années Lors de sa libération, il met à exécution sa soif de vengeance. Il s’aperçoit que le tout est orchestré par un millionnaire qui lui aussi veut se venger pour le tort que lui a fait subir Doucette. Dans leurs quêtes respectives, des dizaines des morts et de blessés en subiront les conséquences.
Lee filme la violence extrême avec une virtuosité qui dépasse celle qui avait fait la réputation de l’original. Il y a une séquence en particulier où Josh Brolin, formidable dans la peau de Doucette, découpe le cou du responsable de l’établissement quasi-carcérale (Samuel L. Jackson), je mets au défi quiconque de ne pas frémir sur son banc lors du visionnement.
Lee et ses scénaristes ont mis un peu de chaire autour de l’os. Dans l’original, Park allait droit au but, alors que maintenant il y a une longue séquence qui précède l’enfermement. Le spectateur a le temps de bien connaitre le personnage principal, de comprendre pourquoi des gens peuvent arriver à le haïr au point de l’enfermer durant des années. Le scénario du coréen supportait difficilement la deuxième écoute parce que il n’était orienté que vers le «punch» final, tandis que la version de l’américain fonctionne au delà de ça.
Malgré le poids de l’original, Lee trouve dans ce film des thèmes personnels, la relation au père était le thème central de He Got Game, revient ici des façons exponentiation, sans dévoiler rien, une séquence de flashback rappelle étrangement School Daze… mais la plus belle touche spikeleeienne du film, dans la chambre de l’enfermement un magnifique cadre orne le mur, un noir stéréotypé au maximum habillé en groom, une véritable signature de l’auteur tout droit sorti de Bamboozled.