Sleeping Beauty est le 17e des «Classiques d’animations Disney» figurant parmi les plus réussis et les plus ambitieux artistiquement. Le véritable génie derrière le succès de Sleeping Beauty n’est pas Walt Disney, ni l’un des trois réalisateurs attitrés au projet (Les Clark, Eric Larson et Wolfgang Reitherman), mais Eyvind Earle, illustrateur new-yorkais qui entra au studio Disney 1951. Ce dernier fut responsable des arrières plans du film qui sont ici, plus que dans tous autres films du Studio, de véritables chef-d’œuvre.
Esthétiquement, Sleeping Beautry n’est pas un film d’animation comme les autres, il est plus proche de se que nous appelons aujourd’hui «motion comic», c’est à dire un image fixe dans laquelle seulement quelques éléments sont en mouvement. Cela donne un aspect très plat visuellement, les images semblent construites par strate, faisant par la même occasion ressortir les décors peints par Earle. Earle s’inspire de l’art médiéval et gothique, faisant de Sleeping un étrange parent visuel de Perceval le Gallois de Rohmer. Tout le reste de la production reste dans cette esprit plus «classique», les gens en charge de l’habillage sonore, sans pour autant puisé dans musique médiéval (comme le fera Rohmer), n’incluront aucune chanson du style des frères Sherman (compositeurs attirés des productions Disney de l’époque, plus proche d’une esthétique à la broadway), George Bruns adaptera plutôt la musique du ballet Sleeping Beauty de Tchaïkovski. La voix anglaise d’Aurora, Mary Costa, a un formation de chant classique, si qui donne une prestance particulière à son interprétation de Once upon a Dream. Les formes irrégulières et rectilignes des personnages donnent, à coté des aspects très «classique» de la production, un contraste moderne et stylisé, proche de ce que l’on faisait à l’époque de la UPA (United Productions of America)1.
Au niveau du récit également le studio essai de faire quelques choses de plus mature, aucun personne animal2., un trajet narratif sans superflu, sans intrigue secondaire, seul un «pas de deux» entre Philip et Aurora vient donné un certain interlude. L’humour y est présente (via le trio des bonnes fées marraine, mais toujours discrète. Dans tout le film, il n’y a qu’une courte séquence humoristique, les bonnes fées marraines tentent de préparer l’anniversaire d’Aurore.
Le film marque aussi un certain milestone pour le studio, le film sorti est 1959, depuis 1950, avec Treasure Island de Byron Haskin, le studio tente le chemin du cinéma en prise de vue réel, le studio garde toujours le capte sur l’animation, mais voit plus grand, il décentralise son attention. Il est d’ailleurs le dernier des trois grands films de princesse de Walt Disney (après Snow-White et Cendrillon), mais également la dernière adaptation de contes de la grande tradition de Grimm et Perrault. Ce n’est que 40 ans plus tard que le studio reviendra aux princesses avec son adaptation d’un conte d’Anderson, The Little Mermaid.
1– One Hundred and One Dalmatians sera d’ailleurs le long métrage suivant du studio Disney, mais on pourrait facilement le confondre avec un film de UPA.
2– Il y une présence animal, mais ils n’ont pas l’importance qu’ont les souris dans Cendrillon.