MANOIR de Martin Fournier et Pierre-Luc Latulippe.
Manoir est un film qui laisse une trace indélébile sur celui qui l’écoute. L’œuvre est définitivement destinée à sensibiliser l’homme moyen à la vie des quelques malchanceux, isolés et littéralement en marge de la société. Mais c’est au travers du regard extrêmement empathique que notre petit cœur de spectateur se brise, devant ces gens si doux, si accueillants, si riches. Une mention spéciale a été accordée au film dans la catégorie Prix Magnus-Isacsson des RIDM 2015 (ACIC/ONF, ARRQ, Cinema Politica et Doc Québec). ♥♥♥½
« Qu’ils aient des problèmes mentaux ou de dépendance, Michel, Paul, Johnny, Philippe, Nathalie ou Gilles vivent sans réels soins au Manoir Gaulin, un endroit qui n’a de manoir que le nom. Avec ses airs de motel abandonné, cet établissement privé situé près du centre-ville de Saint-Hyacinthe et de l’autoroute 20 accueille littéralement la misère du monde. Après qu’un homme d’affaires ait annoncé son intention de le racheter, Martin Fournier (membre du collectif Amerika Orkestra qui réalisa l’étonnant Daytona) et Pier-Luc Latulippe s’y sont installés pour mieux chroniquer cette transition difficile» (Description tirée du site des RIDM).
Je n’écrirai pas énormément sur ce film pour ne pas trop en dire et parce que vous devez le voir. Les nouveaux documentaires sont trop souvent esthétiques, dans le sens où ils esthétisent la réalité. Ils fictionnalisent l’esthétique du film, ce qui à mon avis est plaisant pour le regard, mais s’éloigne de la raison même du documentaire. Dans Manoir, les réalisateurs ainsi que leur caméra laissent vivre le réel. Toujours sur trépieds, souvent très fixe, le film respire. On se concentre sur le contenu, sur ces magnifiques gens qui vivent à l’écran, devant nous, mais qui aussi s’inquiètent, angoissent, rient, pleurent et nous font rire. Les cadrages, justes et lumineux, se présentent comme des témoignages du réel. Parfois la caméra devient amicale, parfois elle disparait pour qu’on ne sente jamais sa présence.
C’est en fin de compte une histoire profondément triste, mais qui incarne la vie de plusieurs personnes, celles qui vivent dans des centres et des maisons d’hébergement de personnes souffrant de troubles émotionnels ou mentaux ou de troubles de la personnalité. Au final, c’est notre regard et notre empathie qui s’ouvrent sur une réalité souvent méconnue, et trop souvent exclue et négligée.