GRETA : OBSESSION FATALE

Irlande, États-Unis, 2019.
Note: ★★

Cinéaste irlandais à la carrière éclectique, Neil Jordan est un auteur pour le moins inclassable. Depuis le début des années 80, le réalisateur a exploré de nombreux genres en auscultant à la fois l’histoire de son propre pays avec des films comme The Crying Game (1992) ou en abordant l’horreur d’une manière novatrice avec Interview with the Vampire (1994) ou plus récemment avec le très réussi Byzantium (2012). Avec son nouveau long-métrage Greta, Neil Jordan propose cette fois sa propre vision du thriller psychologique. Mais le résultat s’avère malheureusement très en-dessous de nos attentes.

Greta (Isabelle Huppert)

Le postulat de départ de Greta ne se distingue pas par sa singularité. Greta, une femme endeuillée interprétée par Isabelle Huppert, monte un stratagème pervers pour manipuler une jeune inconnue nommée Frances McGullen (incarnée par Chloë Grace Moretz) afin de nouer un lien avec elle. Après avoir pris conscience de la supercherie, Frances va alors tenter de prendre ses distances avec Greta. Mais en guise de représailles, cette dernière va commencer à la harceler de manière de plus en plus troublante. Passée cette première partie d’exposition plutôt classique, le film se met rapidement à patauger. Faute d’idées, Greta fait en effet du surplace et ne parvient pas à réellement faire exister ses personnages au sein de ce récit balisé. De plus, le cinéaste ne semble pas canaliser l’énergie d’une Isabelle Huppert toujours désireuse d’en faire plus à l’écran. Connue pour ses choix de rôles difficiles, l’actrice française sombre maladroitement dans l’auto-parodie dans la deuxième partie du long métrage.

Erica (Maika Monroe) et Frances (Chloë Grace Moretz)

De son côté, Chloë Grace Moretz semble lutter pour donner de la substance à son personnage très unidimensionnel. Face à une Isabelle Huppert plus chevronnée, l’actrice américaine semble bien transparente. Ce qui est dommage quand on voit sa performance dans le récent remake de Suspiria (2018) de Luca Guadagnino où elle dévoilait une nouvelle facette de son jeu. Après plus d’une heure d’un jeu du chat et de la souris, Neil Jordan fait enfin progresser son histoire et lui donne une tournure plus inquiétante. Mais là encore, les facilités d’écriture et la direction hasardeuse des actrices empêchent l’installation d’une tension pourtant inhérente au thriller. La dimension psychologique du film est elle aussi trop survolée. Ainsi, il aurait peut-être été plus judicieux et intéressant d’adopter le point de vue du personnage de Greta. Son profil psychologique aurait pu être davantage étoffé et aurait permis d’intégrer une vraie ambiguïté morale au récit. Mais à l’inverse, Neil Jordan fait le choix de la banalité pour conclure son film sur un dénouement très mal amené et assez incohérent de surcroit. Une vraie déception de la part d’un cinéaste qui est pourtant connu pour transcender des sujets et apporter une vraie identité à ses films.

Durée: 1h38

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