Gagarine : Perdu dans l’espace urbain

France, 2020
Note : ★★★

Gagarine, premier long-métrage réalisé par le duo français Fanny Liatard et Jérémy Trouilh, sélectionné au Festival de Cannes 2020, est une petite pépite dans le genre du « film de banlieue » qui séduit par sa fraîcheur et sa pureté.

Youri est un adolescent de 16 ans vivant dans la cité Gagarine, nommé en hommage à l’astronaute russe Youri Gagarine, premier homme à être allé dans l’espace, qui l’a inauguré en France en 1963 à l’occasion d’une tournée mondiale. Le jeune homme est particulièrement attaché à sa cité, tentant constamment de la maintenir dans le meilleur état possible. Il résistera lorsqu’il apprendra qu’elle est menacée de démolition. Quand tout le monde sera évacué, oublié par sa mère, il y restera, établissant en ses murs sa propre « navette spatiale », réalisant ainsi de façon désespérée son rêve d’être cosmonaute.

Les films de banlieue sont devenus un genre en soi dans le cinéma français. De La Haine à Les Misérables (notre critique ici) en passant par L’esquive, Bande de filles, Dheepan (notre critique ici) ou Divines, leur nombre se multiplie.

Or, avec Gagarine, Fanny Liatard et Jérémy Trouilh offrent au genre une tournure originale et rafraichissante plus que bienvenue. Exit le misérabilisme, la criminalité ou la violence, leur film en est un de résistance passive qui passe par la réparation plutôt que par l’affrontement. On est toujours confronté néanmoins à la violence structurelle d’un système qui fonctionne en délaissant les plus démunis.

Le film trouve notamment sa beauté dans son message, celui de l’attachement à sa communauté, à l’endroit d’où l’on vient, et parvient à bien le faire ressentir. On sent le film fait avec le cœur.

Cette dimension gentille et pleine de bons sentiments du scénario fait du bien à l’âme, surtout dans ce genre de film, mais fait aussi en sorte qu’il souffre d’un manque de gravité. On comprend facilement le message du film, métaphorique à souhait, mais sans être troublé ni confronté. L’engagement du spectateur reste superficiel, surtout que le développement des enjeux, des personnages et de l’histoire accuse un certain manque de profondeur.

Fanny Liatard et Jérémy Trouilh compensent leurs faiblesses scénaristiques par une réalisation inspirée, inventive, pleine d’audace et de fulgurance, d’onirisme et de poésie. Le symbolisme, les métaphores et l’insistance sur l’espace sont parfois appuyés, mais le tout trouve un charme dans sa candeur.

Au final, à défaut d’être mémorable, le film est plus qu’appréciable, révélant des cinéastes talentueux, à suivre et qui, on l’espère, sauront frapper plus fort lors de leur prochain effort.

 

Bande annonce :

Durée : 1h38

Crédit photos : Haut et court

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