Les Misérables – À BOUT DE COURSE

France, 2019
Note :  ★★★★

 

Les Misérables est le premier long-métrage de Ladj Ly, membre fondateur du collectif Kourtrajmé aux côtés de Kim Chapiron et Romain Gavras. Ce film-choral suit parallèlement une équipe de policiers de la brigade anti-criminalité et un groupe de jeunes dans une cité sensible de la banlieue parisienne. La caméra est également braquée sur les différents groupes qui composent le quartier. Les acteurs de ce petit monde se croisent sans se connaître jusqu’à ce qu’une étincelle de violence mette définitivement le feu aux poudres. 

Constat social alarmant, Les Misérables peut s’inscrire dans la lignée des « films de ghetto » américains des années 90 tels que Boyz in the Hood (1991) ou Menace II Society (1993). La France a également eu son lot de films traitant du problème de violence dans les banlieues avec le chef-d’oeuvre La Haine (1995) ou encore Ma 6-T va crack-er (1997). Ici, Ladj Ly choisit d’adopter différents points de vue afin de rester le plus impartial possible dans le traitement de son sujet. Le choix du film-choral est potentiellement risqué car il peut facilement nuire à la fluidité narrative en accumulant trop de prismes. Malgré le choix de ce parti-pris narratif, le film parvient à conserver une certaine harmonie au niveau de son récit. Il réussit brillamment à naviguer entre les différents protagonistes de ce contexte urbain en ébullition. La dimension sociologique du récit ne semble jamais factice et la prise de hauteur permet d’avoir un point de vue global sur les tenants et les aboutissants de la vie de ce quartier sensible. 
Les Misérables repose beaucoup sur la qualité de ses acteurs dont le jeu et la caractérisation s’éloignent du film policier classique. L’objectif est ici de coller davantage à une forme de vérité sociale. Souvent filmé en caméra à l’épaule avec des acteurs non-professionnels, le film prend ainsi des allures de documentaire. Ce qui demeure efficace en restant dans une certaine « urgence » mais se fait aussi au détriment de l’esthétique cinématographique. La mise en scène n’est en effet pas le point fort du film. Le manque d’expérience de Ladj Ly en tant que réalisateur se ressent quand l’action commence à primer sur les échanges. Le climax, aussi brutal soit-il, manque par conséquent d’une certaine ampleur. L’action n’est pas toujours bien lisible et le montage pas suffisamment rigoureux pour donner à cette conclusion toute sa force. Reste néanmoins un grand film qui aura amplement mérité le succès public et critique qu’il a rencontré. Un film qui évite paradoxalement le misérabilisme pour faire place à l’angoisse, l’action et l’urgence. 

Durée : 1h42

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