Remake américain avec Nicole Kidman et Julia Roberts, Secrets in their eyes ne touche jamais sa cible de captiver par son enquête ou sa romance. Mieux vaut conserver en tête son original ♥
Los Angeles, 2002. Le spectre du 11 septembre est encore présent chez les forces de l’ordre. L’agent du FBI Ray Kasten déroge de ses priorités pour enquêter sur le viol et le meurtre de la fille d’une de ses collègues. Au fil de ses recherches, il découvre que le principal suspect est protégé par ses supérieurs, ce qui ne l’empêche pas de vouloir le coincer à tout prix. Les années passent, l’assassin n’a toujours pas été arrêté et lorsque Ray décide de ressasser le passé, plusieurs obstacles se dressent devant lui. Il y en a même qui prennent la forme de ses anciens alliés.
Secrets in their eyes est à l’origine un roman, puis un film à succès (pour son échelle), gagnant surprise d’un oscar du film étranger en 2010 au nez et à la barbe des favoris Le Ruban blanc et Un Prophète. Son remake américain aurait pu être un long métrage intéressant s’il n’avait pas souffert d’une mise en scène assez fade et d’une comparaison inéluctable avec son film original, El secreto de Sus Ojos, bien plus lyrique et fascinant.
Si le film de Billy Ray peut se regarder indépendamment, c’est que le scénario a été légèrement remodelé afin de replacer l’intrigue contextuelle dans un cadre spatio-temporel post-attentats du 11 septembre 2001 aux États-Unis; les personnages sont eux assez proches à l’exception de celui interprété par Julia Roberts qui était originellement un homme.
D’ailleurs c’est en choisissant la naturelle Roberts et la retouchée Kidman que la production souhaitant sans doute interpeller le spectateur. Car si vous prenez un scénario original passionnant (adapté d’un roman d’Edouardo Sacheri), que vous y ajoutez trois acteurs de renom dans un polar, le résultat final aurait pu valoir son pesant d’or.
Le problème est que les choix de réalisation de Billy Ray ne créent jamais aucune intrigue intéressante aux yeux du public. Ce n’est pas tout à fait un polar; les scènes et l’enquête avancent sans vraiment d’explication ponctuées d’un montage brusque fatiguant légèrement le regard (la palme pour la course-poursuite en shaky cam). Enfin les bons incessants entre le présent et le passé se mêlent tellement qu’il devient difficile d’identifier correctement les deux époques (Chiwetel Ejiofor a la barbe légèrement grisonnante mais Kidman et Roberts ont quasiment les mêmes têtes).
Si le film original prend le meilleur de sa double histoire (histoire d’amour et polar), le long métrage de Ray ne réussit pas la même prouesse, la faute essentiellement à sa mise en scène.
Côté interprétation, il nous fait plaisir de retrouver Kidman et Roberts. S’il est vrai que l’on a un peu oublié l’actrice américaine ces dernières années, c’est qu’elle s’est faite plus rare de sa propre volonté tandis que Kidman continue tant bien que mal une carrière qui de plus en plus prend l’eau; il est toutefois plus intéressant de la voir dans des films moins grand public tels que Rabbit Hole et Julia Roberts dans l’amusant August Osage County. Pour Secrets in their eyes, Kidman est momifiée dans ses expressions quant Roberts semble obligée d’accentuer le trait et dans ses réactions et dans sa laideur (pas de maquillage, les traits tirés, fatigués…etc.). Quant à Chiwetel Ejiofor, il est, lui, peu convainquant en enquêteur qui en fait trop .
Le bilan est donc forcément décevant avec une emphase mise sur ses interprètes plutôt mal dirigés ce qui gâche complètement le plaisir de l’intrigue à tiroir.