La tentative de Bumblebee

États-Unis, 2018
Note : ★★1/2

Travis Knight, le réalisateur du magnifique Kubo and the Two Strings, change complètement de registre et offre un produit robotique avec un soupçon de personnalité dans l’air du temps. Loin d’être un grand film, Bumblebee se laisse cependant regarder sans jamais véritablement activer le possible mépris cinéphilique envers les superproductions hollywoodiennes sans âme.

Le charmant Bumblebee dans Bumblebee

Bumblebee débute dans les règles du genre : une scène de bataille sur la planète d’origine des Transformers en pleine résistance des Autobots, rebelles devant fuir vers la planète Terre. L’Autobots du titre, Bumblebee s’y retrouvera en exil. En détruisant un ennemi l’ayant suivi dans sa fuite, il perdra la mémoire… et la parole. Sans vie pendant quelque temps, il sera alors réanimé par une adolescente (Hailee Stanfield). Dès ce moment, le film délaisse quelque peu ses allures de film d’action sur les stéroïdes pour révéler sa véritable identité : un film pour adolescent… qui n’est pas une comédie romantique.

Bumblebee s’intéresse davantage -avec un très petit succès- au processus de deuil de sa protagoniste principale qui a perdu son père. Le succès est relatif parce que si son amitié avec Bumblebee peut être sympathique, elle est surtout instantanée, donc expéditive. C’est le gros problème du film : malgré le fait qu’il se démarque grandement de la série des films de Michael Bay, il ne peut éviter les pièges des superproductions, trahissant ainsi sa nature. Il y a peu de scènes d’action pour un film de près de deux heures, au plus une demi-douzaine. Elles sont courtes (quelques minutes chacune). Mais ces quelques scènes d’action sont bien menées par Travis Knight. Le réalisateur s’amuse à quelques reprises avec sa caméra, sans pour autant réussir à inclure toute l’agilité dont il faisait preuve dans son premier long métrage d’animation Kubo and the Two Strings

Hailee Steinfeld dans Bumblebee de Travis Knight (Paramount Pictures).

Le principal problème est le scénario. La scénariste Christina Hodson manque cruellement d’originalité et d’inspiration pour aborder le drame de l’adolescente Charlie. À sa possible défense, les libertés de complexité scénaristique pour une superproduction doivent être plutôt minimes. La crise d’adolescence de Charlie est tout sauf complexe ou subtile, les dialogues déversant un cliché après un autre. Hailee Steinfeld se débrouille plutôt bien, mais elle ne peut pas rattraper la faiblesse de ces déjà vu. Les raccourcis et incohérences scénaristiques peuvent épuiser; des développements psychologiques à peine présents aux symboliques simplistes (on pense ici au plongeon). La carte de la nostalgie est exploitée, le film se passant dans les années 1980. Musique, produits divers, t-shirts de bands musicaux, classiques du cinéma populaire, tout y passe. Knight s’en sert plutôt bien cependant, incluant quelques-unes de ces références dans les actions (The Smiths ou encore The Breakfast Club).

Affiche originale de Bumblebee

Là où le film plaît, c’est dans son changement de ton. Le spectateur peut y entrer en espérant y voir un film de Transformers et il l’aura. Mais pas tout à fait. Le personnage de John Cena marque ce changement passant d’un militaire austère à un personnage avec de l’autodérision, un peu comme le fait le film.  Bumblebee est charmant et attachant, l’action est présente, la quête est simple et intelligible ; aucun effort n’est requis de la part du spectateur. Le film frôle souvent avec la comédie, d’où son aspect plus léger. Sa protagoniste principale est autonome, indépendante et n’est jamais sexualisée. Bumblebee laisse l’impression que le studio a voulu rendre une certaine féminité à la franchise, sans pour autant y faire fuir les admirateurs masculins, oserons-nous dire les machos. Le film est certes plus dilué, mais il reste agréable. Knight et Hodson ont tenté d’inverser les rôles; notre héroïne est en contrôle, son acolyte (et intérêt amoureux) est drôle et passif, et les seules objectivisations/sexualisations sont faites sur des corps masculins. La dernière ligne de dialogue révèle les intentions du film tout en étant plaisante à entendre par les implications scénaristiques qu’elle sous-entend.

Bumblebee n’est pas le blockbuster de l’année, mais il a au moins le mérite d’essayer de changer un peu l’identité d’une franchise épuisée et épuisante. Ce petit vent de fraîcheur est le bienvenu. Même s’ils n’y sont pas encore tout à fait.

Durée : 113 min

Bande-annonce originale anglaise

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