Après le 11 septembre 2001, le renseignement américain traque pendant plus de dix ans Oussama ben Laden, chef du réseau jihadiste Al-Qaida, jusqu’à la nuit fatidique avec l’opération Neptune’s Spear conduite par les forces spéciales américaines.♥♥♥♥♥
Zero Dark Thirty, c’est en anglais le jargon militaire pour signifier la nuit noire alors même que les SEALS (commandos de l’US Navy) sont à même de poser le pied sur un nouveau sol; Certain de citer « Minuit l’heure du crime »…nous n’en sommes pas loin !
Car on a beau en connaître l’issue, pendant deux heures et demie, la réalisatrice Kathryn Bigelow réussit à emporter le spectateur au cœur d’une histoire exceptionnelle sur la traque de Ben Laden.
L’avantage évident dont elle bénéficie est que le quidam conserve rarement dans sa mémoire les éléments et dates exactes des événements passés. Bien sûr, tout le monde a en tête le 11 septembre 2001, c’est d’ailleurs sur les appels téléphoniques d’avant l’effondrement des tours que s’ouvre son dernier long métrage. Mais qui aujourd’hui serait capable de dire en quelle année fut capturé Ben Laden ou Sadam Hussein.. ?
C’est donc avec ces réminiscences floues que l’on est plongé dans un film puissant et indispensable. Fort est pronostiquer ici Zero Dark Thirty comme le futur gagnant du meilleur film 2012 aux oscars. Kathryn Bigelow utilise encore cette année le même procédé qui avait déjà fait ses preuves pour démineurs, à savoir sortir le film au dernier moment (fin décembre) sans créer aucune attente (en comparaison des Tarantino ou Misérables) en espérant créer la surprise sur les cours deux mois de votes.
Revenons maintenant aux raisons pour lesquelles le film s’avère le candidat idéal aux oscars.
Nul besoin de rappeler que la mort de Ben Laden fut célébré aux États-Unis comme une réussite majeure; Un film réalisé à l’effigie du travail de la CIA et des militaires allait forcement être bien vu.
Mais lorsqu’il s’agit d’analyser au plus prêt le travail de Bigelow et de son scénariste, force est de constater que les faits sont là.
Journaliste déjà récompensé pour ses œuvres, Mark Boal retrouve sa complice de « The Hurt Locker/Démineur » pour fournir un travail incroyable de recherche et réécriture. Au travers les scènes de ce long métrage et de ses dialogues (inspiré d’entrevues), l’histoire réussi à captiver par la vraisemblance avec les personnes directement impliquées dans la traque.
Si le titre s’apparente réellement au 2 mai 2011, date de l’assaut des Seals dans la forteresse de Ben Laden, le long métrage, lui, revient essentiellement sur les prémisses de cet assaut. Il condense près d’une décennie de traques à travers différents pays.
Pas évident de sélectionner le point de vue à traiter ? Large film politique ou caméra intimiste ? Finalement, Bigelow choisit de s’attarder sur Maya (fantastique Jessica Chastain), une jeune officier de la CIA qui a joué un rôle prépondérant dans la traque et la mort de Ben Laden.
Pendant deux heures, et malgré de nombreuses ellipses, son travail est présenté souvent à la limite du documentaire. Les quarante dernières minutes sont le temps nécessaire pour évoquer le raid en temps réel qui eu lieu dans la maison du leader terroriste. A l’écran, le spectateur est placé comme l’un des militaires équipés de lunettes à vision nocturne.
Et le film de culminer avec une intensité dramatique des plus importantes.
Un temps suspecté et accusé d’espionnage par le Pentagone, Bigelow et son film se trouvent déjà au cœur d’une polémique annonçant que la « torture » effectuée par la CIA ne fut pas une des techniques qui ont constituées la « clé de la réussite (…) Certaines provenaient de détenus soumis à des techniques d’interrogatoire renforcées, mais de nombreuses autres sources de renseignement provenaient d’ailleurs ».
Ce à quoi la réalisatrice et son scénariste ont rétorqué que « le film montrait bien qu’aucune méthode n’avait forcément été décisive dans cette chasse à l’homme »
La polémique est d’autant moins justifiée que Leon Panetta (directeur de la CIA) a admis que la torture par l’eau (autorisée par Bush Jr) appliquée à 183 reprises à Khalid Cheikh Mohammed a permis de récupérer des informations qui ont conduit à la cache de Ben Laden.
Avant d’être couverte de prix, Kathryn Bigelow doit faire face à un ensemble de questions et de critiques qui ne devraient durer qu’un temps.
Dans la mémoire collective Zero Dark Thirty devrait réellement rester comme un film majeur.