The Night House a les fondations fragiles

Royaume-Uni, 2020
Note : ★★ ½

Autant influencé par l’elevated horror des productions A24 que par les classiques du genre, The Night House se présente comme un patchwork du paysage cinématographique horrifique actuel. Il puise aussi bien dans Hereditary (2018) que dans The Invisible Man (2020),  The Ring (2002) ou Ghost (1990) sans pouvoir véritablement s’émanciper de ses aînés. David Bruckner esquisse de bonnes idées, mais à cause d’une mise en scène manquant de relief et  un scénario qui patine dans sa deuxième moitié, un ennui poli s’installe et on finit par simplement attendre une conclusion qui se dessine avant tout comme prévisible.

Le pitch est assez simple, après la mort de son mari, Beth commence à se demander si la maison qu’il a construite de ses mains ne serait pas hantée. Par petites touches, le réalisateur déploie un mystère entourant la construction de la maison. Des plans sur des miroirs, des inscriptions étranges et des messages codés dans des plans d’architecte laissent présager que la maison sera le lieu de rencontre d’un monde parallèle. La mise en place de l’univers structuré par une économie d’effets, une ambiance intrigante et un rythme relativement lent, pour une production grand public de ce calibre, est très agréable à suivre. Le personnage joué par Rebecca Hall est rapidement attachant et arrive, aidé par les dialogues, à se détacher des clichés du genre. La première heure du film est ainsi fort bien réussie, seulement cela ne dure pas.

Détourner les maisons, lieu chargé de symbolique et de souvenirs d’enfance pour en faire le théâtre de l’horreur est souvent quelque chose qui fonctionne bien, surtout lorsque l’on traite la maison comme un élément central de la mise en scène. Hereditary ou The Conjuring le font très bien par exemple. Dans ce dernier, James Wan, présente la maison grâce à plusieurs plans séquences naviguant ainsi entre les pièces afin de nous faire découvrir de façon ludique les lieux. Cette exposition lui permet ensuite de jouer avec la caractéristique même d’une maison, les couloirs, les escaliers, les recoins et les portes. The Night House à l’inverse cloisonne sa mise en scène, le personnage se déplace de plan fixe en plan fixe à travers les étages. Ce choix esthétique n’aide pas à placer la maison comme une entité à part entière. On a du mal à s’y réparer et à s’en faire une carte mentale, ce qui n’est pas aidé par son architecture complexe. La maison n’est alors ni accueillante ni effrayante, ce qui est problématique quand elle est censée être le cœur du scénario. 

David Bruckner répète inlassablement les mêmes scènes, réveil en sursaut, élément étrange, ombre, jump scare, ombre, jump scare, réveil au matin. On n’a alors jamais vraiment peur lorsque Beth rentre chez elle, car la source scénaristique de l’horreur est bien la maison, mais celle de la mise en scène est manifestement le sommeil. À la manière d’un Paranormal Activity, on commence donc à comprendre que les personnages n’ont rien à craindre en journée. Mais malgré son titre trompeur, The Night House n’appréhende jamais vraiment la nuit non plus. Le personnage n’a jamais peur de dormir, de rêver ou de rentrer chez elle. La force de Paranormal Activity était de diviser son esthétique en deux et jouer sur la pulsion scopique pour nous forcer à regarder ce que l’on ne veut pas voir. Ici l’esthétique horrifique du film n’appuie ni sur le jour, ni sur la nuit, ni sur la maison, aucun espace n’est alors réellement dangereux tant que Beth ne dort pas, sauf que le scénario ne s’intéresse pas non plus au sommeil de son héroïne. Une dissonance s’installe alors entre histoire et mise en scène et brise l’équilibre du film. Cette base trop fragile l’empêche de tenir debout lorsque tout s’accélère dans sa deuxième partie.

Ce problème est fondamentalement lié à l’envie de faire de cette deuxième partie une enquête. Plus on avance dans l’histoire, plus le mystère entourant la confection de la maison s’épaissit. On retrouve donc une formule assez connue du film d’horreur présente dans Hereditary ou The Ring.  Le personnage creuse, fouille, découvre des symboles, interroge des témoins, lit des livres, sans jamais vraiment comprendre ce qu’il se passe. Cependant cette formule est plus efficace lorsqu’elle sert l’horreur du film. Pour reprendre la comparaison avec Hereditary, dans ce dernier, les scènes d’enquête donnent de l’épaisseur à la diégèse et nous gardent activement investis. Lorsque Toni Colette fait la séance de spiritisme, c’est certes une scène d’exposition, mais également un prétexte pour créer une situation inédite et une nouvelle scène d’horreur. Ici on se retrouve avec l’effet inverse. Les scènes d’horreur deviennent des indices pour la partie enquête, mais étant donné que Beth ne craint rien tant qu’elle ne s’endort pas, l’enquête n’est jamais prétexte à un renouvellement des situations horrifiques. Et comme le sujet du sommeil et du rêve n’est pas traité, on ne se retrouve pas non plus dans une formule à la insidious dans lequel les personnages entrent sciemment dans une scène d’horreur pour y trouver des informations.

Comme le film se concentre sur son enquête, les personnages stagnent et deviennent rapidement insupportables. Beth devient de moins en moins cohérente sans que cela soit vraiment justifié par le scénario. Sa meilleure amie s’empêtre dans son syndrome de Scully et ne croit à rien de ce qu’on lui raconte même devant des preuves tangibles. Finalement les révélations sur le mari décédé sont trop grotesques et mal amenées pour être prises réellement au sérieux. Les propos que le film semblait vouloir déployer sur le suicide et le deuil sont annihilés au profit d’une fin classique et prévisible.

The Night House est donc un film sympathique dans sa première moitié, mais qui ne parvient jamais à trouver son équilibre entre horreur et enquête dans son dernier tiers. Il est de plus empêtré dans ses références ne comprenant jamais vraiment ce qu’il cite et pourquoi. C’est un film plein de promesses, mais qui malheureusement n’arrive à en remplir aucune.

Bande-annonce originale anglaise :

Durée : 1h47
Crédit photos : Fox/Searchlight Pictures

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