Problème de fond dans la représentation des minorités dans le cinéma américain. Retour de la polémique OscarsSowhite
Pour une deuxième année consécutive, il n’y a aucun acteur noir dans la liste des 20 différents nommés aux catégories d’interprétation aux Oscars. Rapidement, les critiques ont fusé de toute part ; Will Smith, Jada Pinkett, Spike Lee ou George Clooney ont tous annoncé leur intention de boycotter les oscars alors que même des nominés, comme Mark Ruffalo, questionnent leur présence. Il n’en fallu pas plus pour que le hashtag #oscarssowhite crée l’an dernier dans la foulée de la même polémique reprenne du service.
Discrimination Systémique
Rapidement, tous les acteurs du milieu du cinéma américain et international (ainsi que bon nombre de commentateurs, artistes et intervenants en tout genre) ont pris la parole pour y ajouter leur grain de sel. On a notamment vu Steven Soderbergh stipuler qu’une bonne part du problème résidait dans le fait que les minorités étaient beaucoup plus intéressées à aller voir des films représentants des réalités blanches que le contraire (l’excellent Straight Outta Compton pourrait être l’exception de 2015, ce qui rend son exclusion encore plus incompréhensible). Spike Lee quant à lui a renchéri en disant que tout le monde ici (à l’Académie) a voté pour Obama, mais quand je vais dans vos bureaux, je ne vois pas de noirs, sauf le frère qui est à la sécurité qui vérifie que mon nom est bien sur la liste.
Disons que nous ne sommes pas surpris que L’Académie des Oscars, masculine à 76 % et blanche à 93 %, vote en vase clos pour son public. Le problème de la représentation des minorités (et des femmes) dans le cinéma américain est systémique, uniquement par les représentants de l’industrie, les membres de l’Académie et les grands bonzes des studios, qui sont hommes, vieux, et blanc. Dans un geste spectaculaire, celle-ci a néanmoins posé certains geste, notamment en annulant les cartes de membre à vie des académiciens et en les remplaçants plutôt par des mandats de 10 ans renouvelables si l’artiste a été actif dans les 10 années précédentes. Même s’il s’agit d’un pas très important considérant la lenteur et l’archaïsme de ,Académie, espérons seulement que ce sera la première action d’une série.
Charlotte Rampling, grande actrice, petites paroles
La controverse a pris une nouvelle ampleur lorsque la célèbre actrice britannique Charlotte Rampling a laissé entendre en entrevue à la télévision sur Europe 1 que Spike Lee faisait du racisme anti-blanc’’ et que (…) on vit dans des pays maintenant où tout le monde est plus ou moins acceptés. Je ferai abstraction du premier segment de son affirmation puisqu’elle semble faire en retour abstraction des millénaires d’oppression de l’un des groupes sur les autres, et me contenterai de rappeler à Madame Rampling que certains ont plus de chances que d’autres d’être acceptés que ce soit par la justice (les noirs sont 12%, mais représentent 40% des prisonniers aux Etats-Unis et reçoivent des peines de 10 à 20% plus élevés que les blancs), l’économie (le taux de chômage des diplômés afro-américains est deux fois plus élevé que celui des blancs) ou la communauté artistique (les acteurs noirs ont reçu 4% des Oscars depuis la création de l’Académie en 1929.
Des statistiques comme celles-là, il y en a des centaines. Celles-ci illustrent cruellement les disparités entre blancs et noirs aux États-Unis et que, malheureusement, tout le monde n’est pas accepté également. Quand on pense qu’il y a un peu plus de 50 ans, les noirs et les blancs ne pouvaient s’asseoir au même endroit dans l’autobus ou boire à la même fontaine d’eau que les blancs et que l’esclavage était le traitement réservé aux communautés afro-américaines du sud des États-Unis il y a 150 ans, on pourrait se dire que le statut minoritaire des noirs dans le cinéma aux Etats-Unis aurait mérité mieux qu’un simple ‘’no comments’’.