Malgré des envies assumées de baroque à la limite du kitch, le long métrage de Justin Kurzel est sauvé par ses interprètes et une scène de repas qui porte le film.♥♥♥½
11ème siècle : Ecosse. Macbeth, chef des armées, sort victorieux de la guerre qui fait rage dans tout le pays. Sur son chemin, trois sorcières lui prédisent qu’il deviendra roi. Comme envoûtés par la prophétie, Macbeth et son épouse montent alors un plan machiavélique pour régner sur le trône, jusqu’à en perdre la raison.
On pouvait s’attendre au pire de cette nouvelle adaptation du classique de Shakespeare. Même si le film avait été sélectionné à Cannes (en compétition qui plus est), on se demandait si ce n’était pas une « erreur voulue » par les programmateurs afin de combler les journalistes du venin qu’ils sont capables de déverser parfois sur certains longs métrages… Car la bande annonce laissait présager une fresque baroque-lyrique et osant la surenchère partout (de la photo à la musique en passant par un étalonnage rouge sang)… Cela pouvait, forcément, très sérieusement agacer. Pourtant, malgré une absence évidente de prise de risque (on est très loin de Baz Luhrmann et son Roméo + Juliet), Macbeth ne s’avère par le four qu’on pouvait prévoir…Et même si le film est reparti bredouille du festival au printemps dernier, dispose d’un certain nombre de qualités qui devraient rassurer le public. Certes, on est loin du joyau qu’était le Hamlet de Kenneth Branagh…mais on ne perd pas son temps non plus. Explications.
Commençons tout d’abord par le moins bon dans cette nouvelle adaptation.
Les passages monologués sont légion chez Shakespeare, et c’est sans doute ce que Kurzel réussit le moins bien. Ils alourdissent le film plutôt que de le rendre léger ou accessible. Ajoutons à cela des ralentis en veux-tu en voilà et le résultat s’avère finalement statique et lourd par moment. Là est sans doute le plus gros défaut du film.
Car tout n’est pas à jeter pour autant à l’image de cette scène de repas à la forte intensité. Certes très travaillé en post-production, le travail de mise en scène est habilement amené pour créer un suspens adéquat et surtout permettre au spectateur d’apprécier autre chose que du texte monologué. Il y a un avant-repas dans ce Macbeth et un après ! Et autant dire que la seconde partie se digère beaucoup mieux que son entrée.
Les choix de colorisation rouge sang qu’on retrouve sur une bonne partie du film et à la fin sont discutables mais ils ne rendent finalement pas le tout risible (la surabondance de filtres ou de travail au niveau de la couleur peut très facilement faire perdre toute crédibilité à un film). Surtout, le film n’atteint jamais un niveau de surenchère qui l’aurait définitivement anéanti (et ce malgré la brume, les ralentis et les filtres…ouf !)
Le gros point fort du film est bien entendu l’interprétation de Fassbender…Shakespeare semble avoir pensé à lui à l’écriture de ce Macbeth. Bien sûr la comparaison avec Branagh est inévitable mais l’acteur irlandais n’a pas à rougir de sa performance. C’est plutôt la réalisation qui pourrait souffrir de la comparaison avec l’auteur anglais.
Enfin se pose le choix de Cotillard qui connait sans doute mal les subtilités écossaises (et n’a pas non plus son accent / Fassbender semble lui avoir perdu son accent irlandais depuis bien longtemps). Disons qu’elle s’en tire plutôt bien et que peu d’actrices de son âge aurait pu tenir tête à Fassbender de la sorte (surtout pas Natalie Portman initialement pressentie). Avec dix ans de moins, Kate Winslet aurait, forcement, été parfaite. On aurait adoré voir la confrontation.
L’expérience semble toutefois avoir été agréable aux acteurs puisqu’on sait que Kurzel retrouvera ses deux acteurs pour l’adaptation d’Assassin’s Creed fin 2016…Finalement, cela sera peut-être plus son univers à lui comme à elle. En revanche, Fassbender tient lui (encore) un grand rôle !