États-Unis, 2019
Note: ★★★★
Mettant les compteurs à zéro d’une franchise vieille de plus de 30 ans, le nouveau Child’s Play risquait de s’aliéner une partie des fans et du public lassés par des années de remakes et reboots en tout genre. Mais cette nouvelle version des tribulations de la célèbre poupée tueuse se révèle finalement rafraîchissante, en inscrivant le récit dans un cadre moderne tout en conservant l’esprit impertinent des premiers films.
La franchise Chucky a connu un destin plutôt singulier au sein de la grande histoire du cinéma d’horreur. Réalisé par Tom Holland en 1988, le premier film racontait l’histoire d’un jeune garçon se faisant offrir une poupée malfaisante possédée par l’esprit d’un tueur en série. Pur film d’épouvante, le premier volet a ensuite bénéficié de deux suites conservant le même esprit, mettant toujours en scène le jeune garçon du film d’origine. Avec Bride of Chucky en 1998, le cinéaste Ronny Yu choisit de donner un nouveau départ à la franchise en l’orientant davantage vers la comédie gore et référentielle. Les derniers films sortis en date (Curse of Chucky, 2013 et Cult of Chucky, 2017) ont finalement réorienté la franchise vers une tonalité plus sombre. À noter que depuis le premier volet, la franchise était restée dans les mains de son créateur Don Mancini qui incarne à lui seul l’âme d’une des sagas les plus emblématiques du cinéma horrifique.
Ce nouveau film intitulé Child’s Play remet la franchise à plat pour la première fois sans la présence de son créateur Don Mancini. Mark Hamill (!) remplace Brad Dourif pour le doublage de Chucky et le design de la poupée a été modifié afin que le film ait son identité propre. Dès les premières minutes, le ton est donné. Le réalisateur Lars Klevberg choisit de s’éloigner de la tonalité sérieuse des trois premiers films pour se rapprocher de l’esprit comique de Bride of Chucky. La comédie horrifique n’est jamais un exercice facile et beaucoup de réalisateurs s’y sont cassés les dents en ne dosant pas correctement ces deux genres à priori antinomiques. Mais Lars Klevberg réussit son pari en humanisant parfaitement la poupée démoniaque dont l’expressivité se révèle aussi terrifiante qu’hilarante. La voix de Mark Hamill, véritable vétéran du doublage depuis plus de vingt ans, profère au jouet une véritable personnalité. De nombreux fans étaient également inquiets de la présence nouvelle d’effets numériques pour animer la poupée au détriment des effets pratiques privilégiés depuis 30 ans. Mais le rendu fonctionne en réalité à merveille.
Un vrai travail a également été effectué sur la direction artistique et la lumière. Cette atmosphère contribue à efficacement donner au film des allures de conte horrifique. Moins de surprises concernant le déroulé du récit en revanche. Le scénario prend néanmoins le temps de donner du corps à ses personnages. Et pour cause, la relation mère-fils sonne juste et l’évolution de la poupée et de son rapport obsessionnel avec l’enfant est correctement traitée. Pour cette version 2019, la modernité et l’interconnexion des appareils électroniques s’invitent dans la franchise. Avec le système Cloud, Chucky peut activer d’autres appareils et ainsi déployer un arsenal pour la mise à mort de ses victimes. On regrettera toutefois une violence plus sage que dans les précédents opus, le studio voulant probablement surfer sur le récent succès de It (2017) et séduire un public plus adolescent. Néanmoins, cette nouvelle version de Chucky parvient à gagner le pari risqué de respecter l’univers de la saga originelle tout en se forgeant une identité propre en proposant un traitement plus moderne. Cela va-t-il suffire à ressusciter une saga cinématographique qui peinait quelque peu à passionner les spectateurs ces dernières années? L’avenir le dira.
Durée: 1h32