Bilan du cinéma français 2015 et Box-Office

Si l’année 2013 avait battu un record avec la sortie de plus de 300 films, la cuvée 2014 annonçait déjà l’amorce d’une baisse des productions françaises, à savoir 262 films, contre 222 cette année. Bilan du cinéma français en 2015, tant quantitativement que qualitativement !

Force est de constater que le cinéma français a moins la côte ces derniers temps et poursuit sa lente régression avec une fréquentation des salles de 3% inférieure à celle de l’année précédente (chiffres relatifs à l’hexagone qui est l’indicateur, vous en conviendrez, principal). Les sorties de films français au Québec connaissent également un faible achalandage : 83 films en 2014 dont 58 ont attiré moins de 5000 spectateurs et 24 moins de 1000 (selon un dossier paru dans La Presse)

Box-Office

On forgeait pourtant quelques espoirs avec 4 films français qui s’étaient hissés en 2014 dans le peloton de tête, une configuration inédite depuis un demi-siècle. Néanmoins, sur les 10 œuvres classées au box-office cette année, seulement deux sont françaises, c’est dire….

Les blockbusters Jurassik world et Fast and furious 7 dévorent tout sur leur passage aidés par les films d’animation Inside and out (plus de 25 semaines d’exploitation) et Les minions qui s’offre la première place du podium avec plus de 6 millions d’entrées. Les deux gros cartons français cette année sont des comédies encore inédites au Québec : Les nouvelles aventures d’Aladin et Les profs 2, qui tirent profit de la présence et de la renommée auprès des jeunes (plus grosse part de marché) de l’humoriste Kev Adams.

Box-Office_France_2015Les Français semblent chercher à se divertir et font alors de ce genre, le plus prisé, comme à l’accoutumée. En effet, se démarquent au-dessus du million d’entrées plusieurs anciens de la chaîne Canal+, Jamel Debbouze (Pourquoi j’ai pas mangé mon père) mais aussi Dominique Farrugia (Bis). On notera également la belle reconversion derrière la caméra d’anciens acteurs de la troupe des Robins des Bois : Pierre-François  Martin-Laval et Jean-Paul Rouve qui placent tous deux leur film, Les profs 2 et Les souvenirs parmi les plus gros succès de cette année. Aussi, malgré les avis partagés de la critique, dont celui de la rédaction à Cinémaniak, les auteurs de l’excellent Le prénom ont séduit les masses avec la débandade familiale de Papa ou maman, rameutant plus de 4 millions de spectateurs pour une bataille gagnée d’avance.

les-nouvelles-aventures-d-aladin

D’autres comédies se sont taillées une place importante sans faire trembler le box-office visant plus la subtilité des propos qu’à rejoindre le grand public : Comme un avion, Le talent de mes amis, Caprice, Un peu beaucoup aveuglement et Toute première fois.

Derrière les comédies, la qualité du cinéma d’auteur?

Quelques rares surprises du côté du cinéma d’auteur peinent à sortir la tête de l’eau et passent difficilement le cap du million d’entrées malgré la notoriété de leurs réalisateurs. C’est le cas de Marguerite de Xavier Giannoli et Le dernier loup de Jean-Jacques Annaud. Il faudra pourtant compter sur ce même cinéma d’auteur pour redonner ses lettres de noblesse au cinéma français. Cette année, les plus prestigieux festivals ont reconnu le talent made in France, notamment à Venise où Fabrice Luchini s’est vu octroyer la coupe Volpi pour son rôle dans L’hermine de Christian Vincent alors que Bertrand Tavernier recevait un prix pour l’ensemble de sa carrière.

Jacques_Audiard_Palme_or

Mais c’est à Cannes que le cinéma français s’est le plus fait remarquer. Tout d’abord Jacques Audiard, un habitué de la Croisette, a remporté la Palme d’Or pour son mitigé Dheepan qui retrace le parcours d’un réfugié tamoul (étrangement Un Prophète et De Rouille et d’Os n’y ont rien reçu pourtant accueillis par une critique plus unanime). Enfin, les deux prix d’interprétation sont allés à Vincent Lindon et à Emmanuelle Bercot pour leurs rôles dans La loi du marché de Stéphane Brizé et Mon roi de Maîwenn, deux films sans concessions qui ont beaucoup séduit la rédaction pour leur univers anxiogène. Le premier brosse un portrait sombre et fataliste du monde du travail tandis que le second dépeint une relation passionnelle destructrice avec un pervers narcissique. Se sont également illustrés à Cannes Guillaume Nicloux et Arnaud Desplechin qui signent avec Valley of Love et Trois souvenirs de ma jeunesse, deux œuvres marquantes dans leur filmographie respective.

Bilan du cinéma français en 2015

Difficile de parler de Cannes 2015 sans évoquer la présence du chahuteur Gaspar Noé (entrevue pour Cinemaniak) qui, une fois de plus, a su donner du plaisir en faisant la manchette avec son dernier long métrage Love, premier film français montrant une éjaculation faciale en 3D. Oui monsieur, rien que ça ! Derrière le tapage médiatique que cette séquence n’a pas manqué de provoquer se cache pourtant une œuvre visuellement aboutie, qui instruit et propose, comme le faisait Irréversible avec une forme, certes, parfois discutable.

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Cette année ne nous a pourtant pas épargné plusieurs déconvenues, en commençant par l’adaptation du roman de Stephen McCauley, L’art de la fugue, film trop bavard et décousu qui rate sa cible, tout comme le remake Un moment d’égarement, copie insipide du film de Claude Berri. Du côté des “valeurs sûres”, avec Belles familles,Jean-Paul Rappeneau déçoit, tout comme Benoît Jacquot et ses Trois coeurs qui a divisé notre rédaction.

Pour les surprises, cette année (comme bien souvent) il a fallu lorgner du côté des outsiders. On pense au premier film de Louis Garrel, Les deux amis, à la forme audacieuse et à l’écriture intuitive. Même constat pour la comédie Discount, un film prometteur pour son réalisateur, en dépit de quelques lourdeurs. On a aussi pu compter sur la présence gratifiante des réalisateurs Philippe Le Guay avec sa Floride, hymne à la famille et au temps qui passe, ou encore Les Frères Larrieu (entrevue) et leur comédie fantasque 21 nuits avec Pattie. Du côté des polars, ce sont Un homme idéal, L’enquête mais surtout L’affaire SK1 qui ont retenu notre attention pour la maîtrise du suspens et leur documentation fouillée.

Valérie Donzelli quant à elle confirme son talent de direction d’acteurs avec Marguerite et Julien, tandis que notre plus belle découverte de l’année restera sans conteste la rencontre avec le jeune mais non moins touchant Rod Paradot dans La tête haute, dernier film d’Emmanuelle Bercot. Une œuvre qui doit sa force à son charismatique interprète, sorte d’animal sauvage que la caméra tente désespérément d’apprivoiser. Oubliez Antoine-Olivier Pilon dans Mommy, et découvrez le jeu de cet acteur prometteur qui rappelle la détresse et la solitude de Katie Jarvis dans le britannique Fish Tank, un film qui vous pénètre le corps d’une rare violence émotionnelle. L’agitation constante évacuée par le mineur traduit les affres d’une adolescence esseulée par la négligence d’un modèle familial absent faisant de Sara Forestier, la mère dans le film, un personnage dépassé par les évènements à l’instar de Mathilde Seigner dans Une Mère de Christine Carrière.

Mères_au_cinema_en_2015

On peut aussi se réjouir de plusieurs sorties de films français sur le territoire américain. C’est le cas de La French (Dujardin post The Artist), Girlhood (Bande de filles) et Clouds of Sils Maria. Si de nombreux tournages ne s’effectuent plus dans la langue de Molière (Le dernier loup, Dheepan, Love), on peut néanmoins être enthousiaste à l’idée que la France réussisse à se frayer un chemin jusqu’au pays de l’oncle Sam.

Au-delà des frontières françaises, une vigueur francophile intacte

Hors des frontières françaises, on a eu la satisfaction belge avec le lacrymal Deux jours, une nuit des frères Dardenne qui retrouvent leur force narrative, les surprenants Tout nouveau testament et Je suis mort mais j’ai des amis (entrevue) et l’étonnement suisse avec La vanité de Lionel Baier, un film au ton subversif et moqueur.

Le nombre de tournages de films français en 2015 était de 92 contre 57 en 2014. Gageons que ces projets marqueront le millésime 2016 avec des œuvres inspirées et fortes en émotion, à l’image de Made in France de Nicolas Boukhrief, film sur l’infiltration d’une cellule de djihadistes, film qui cherche encore son public, sa sortie ayant été à maintes reprises repoussée en raison des attentats de novembre dernier à Paris.

Les 10 films français 2015 selon notre rédaction

Les10filmsfrançais2015

Bilan du cinéma français 2012

Bilan du cinéma français 2013

Bilan du cinéma français 2014

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