Souterrain nous transporte au cœur d’une mine, parmi un groupe de mineurs et mineuses de Val d’Or. Dans un environnement isolé où les conflits personnels extérieurs au travail se traînent au plus profond de la terre, la cohabitation peut être compliquée. Cinémaniak a rencontré deux acteurs de la distribution. Le premier est au centre de tous les enjeux. Joakim Robillard interprète Maxime, le personnage principal. Entre la création difficile de sa nouvelle famille, son travail et sa culpabilité qui le ronge à cause d’un accident de voiture, Maxime vivra toute une gamme d’émotions. Le second, un habitué dans l’univers de Sophie Dupuis, Théodore Pellerin, interprète Julien, ancien mineur qui souffre d’aphasie des suites d’un accident.
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Marc-Antoine Lévesque : Premier premier rôle au cinéma, la pression se gère bien?
Joakim Robillard : [rires] Oui. En fait, l’affaire la plus stressante, c’était ma première entrevue au téléphone.
MAL : Parce que c’était toi, pas un rôle?
JR : Oui exact. J’avais trouvé ça difficile. Mais après plusieurs, ça va. C’est la seule chose intimidante. Même à l’audition avec Sophie, je n’étais pas stressé. Je savais où je m’en allais, j’arrivais avec ma proposition. Sophie est transparente, donc je savais quand j’étais dans la bonne zone.
MAL : Pour toi Théodore, c’est un retour avec Sophie Dupuis. Tout comme Jeanne Leblanc, Philippe Lesage, tu aimes bien collaborer de nouveau avec les mêmes cinéastes. Quelque chose de plus rassurant? Est-ce que ça permet une plus grande liberté?
Théodore Pellerin : Le dialogue est déjà établi et on se comprend. On sait c’est quoi l’univers de la personne et ce qui les touche, qu’est-ce qu’ils veulent raconter, leur vision, comment ils filment. Avec Sophie c’est particulier, elle m’impressionne par son bonheur et son amour de travailler avec les équipes et de travailler avec les acteurs, elle est vraiment dans son élément.
MAL : Justement Sophie adore les acteurs et pour son second long métrage, il y en a plusieurs! Joakim, est-ce plus intimidant d’être entouré d’autant d’acteurs majeurs ou au contraire on se sent plus en sécurité?
JR : On se sent vraiment vraiment bien. Dès le premier jour quand on a commencé à travailler, Sophie m’a donné beaucoup. Elle m’a fait confiance. Et cette confiance-là avec Étienne [Hansez, le producteur] est revenue et restée-là à Val-d’Or tout le long du tournage. On se sent vraiment bien. Guillaume [Cyr], Mickaël [Gouin], Catherine [Trudeau], James [Hyndman] ce sont tellement des personnes attachantes, drôles. Je ne me suis jamais senti intimidé.
MAL : Théodore, est-ce que vous avez construit le rôle ensemble ou Sophie est arrivée avec le personnage de Julien tel quel?
TP : Le personnage était déjà bien proposé. Pour le trouble du langage, on l’a développé ensemble avec des spécialistes et des rencontres avec des orthophonistes, des physiothérapeutes pour essayer de voir ce qui fonctionnerait avec nous, avec l’accident de Julien, avec l’histoire que l’on voulait raconter. Sophie est partie tourner le début du film et de mon côté j’ai travaillé plus en précision l’aphasie et sa physicalité.
MAL : C’est un rôle différent dans ta filmographie, on est loin de l’énergie de Vincent dans Chien de garde ou l’obsession de Cody dans On Becoming a God in Central Florida, ici tant physiquement que dans le parlé; est-ce que la préparation a été ardue?
TP : C’était plus de s’affirmer dans certains choix et d’y aller. De trouver ce qui fonctionne. À un moment donné tu le sens. En tout c’était trois mois, à commencer par des vidéos sur YouTube jusqu’à plusieurs rencontres pour préciser progressivement. Dans le processus j’ai vraiment fait de belles rencontres. Le Théâtre aphasique de Montréal m’a ouvert ses portes pour que je puisse participer à des ateliers où j’ai vu à quel point l’aphasie peut être variée, que chaque cas est son propre monde.
MAL : Comment on se prépare à jouer dans une mine? Disons que ce n’est pas un terrain de jeu habituel!
JR : Sophie nous avait envoyé beaucoup d’extraits audio, beaucoup d’images. Ça reste que jouer dans un vrai décor comme ça c’est immensément plaisant, pour un acteur c’est la meilleure chose. Après ça, la mine a quand même un côté ‘danger’. Mais sous terre, très sincèrement, tu te sens très bien. La préparation n’était pas si exigeante. Ce qui a beaucoup aidé, c’est la visite d’une mine juste avant le tournage. On est descendu jusqu’au fond. Il faisait 38 degrés. On a brisé la glace. C’était un « ça passe ou ça casse ». On a peur ou pas, c’était là. Donc quand on a commencé à tourner, il n’y avait plus de peur, fallait juste s’approprier le matériel [le scénario].
MAL : Est-ce qu’il y a un stress supplémentaire de par l’environnement? Est-ce que tu l’utilises pour nourrir ta performance?
JR : Il fallait pas qu’il y aille de stress. L’idée c’était de bien jouer des mineurs qui eux ne sont pas stressés, c’est leur quotidien. C’était important de ne pas avoir l’air de Montréalais qui jouent des mineurs. Il ne fallait pas l’avoir cette peur-là, mais plutôt se servir des sons ambiants. Évidemment on avait un tunnel à nous qui n’était pas exploité, mais la mine était en activité. Il y a des sons qui te nourrissent dans ton jeu. Il y a cette atmosphère-là qui vient t’habiter à l’intérieur pour mieux porter une émotion.
MAL : Souterrain te permet un beau range de jeu, de scènes plus intimes avec la conjointe de Maxime, mais aussi des scènes de tension, voire d’action avec les scènes sous terre, ça doit être gratifiant comme défi?
JR : Maxime est un personnage complexe, il n’a pas juste une couleur, il vit des choses intenses. Il vit des choses pas belles, difficiles. Pour tomber là-dedans, pour jouer ça, il faut être vulnérable. C’était ça qui était incroyable avec ce personnage. Et d’avoir la chance d’y donner une couleur. Il fallait qu’il soit attachant. Il fallait qu’on le trouve beau avec sa blonde, mais qu’on le trouve méchant dans d’autres moments. C’était un beau défi. Je souhaite ça à tout le monde.
Bande-annonce originale :
Crédits photos
Photo de couverture, portrait de Théodore Pellerin et de Joakim Robillard : Prune Paycha
Photos de plateau : Christian Leduc