7 battements par minute : Une relation qui ne manque pas de souffle

Canada, Chine, 2024
★★★1/2

Dès les premiers instants du nouveau documentaire de Yuqi Kang, une ambiance éthérée instaurée par la réalisation et une direction photo sublime crée un parallèle entre l’eau de la mer et le liquide amniotique dans lequel baigne un foetus. Cette relation profonde, maternelle et spirituelle, entre un corps humain et l’eau dans laquelle il baigne, est au coeur du documentaire 7 battements par minute, explorant d’abord la carrière de l’apnéiste Jessea Lu, mais plus précisément la relation entre cette dernière et la réalisatrice du film.

Bien qu’elle ait commencé à pratiquer la plongée en apnée au début de sa trentaine, Jessea s’est rapidement hissée au rang des femmes les plus performantes de sa catégorie. Se soumettant à une discipline rigoureuse, l’athlète ne cesse de se dépasser et d’améliorer ses performances personnelles, jusqu’à entrer dans les compétitions mondiales les plus importantes de la discipline. C’est à ce moment que la documentariste Yuki Kang fera sa rencontre, suivant son parcours personnel et professionnel pendant plusieurs années, avant que ne survienne un événement tragique qui changera la relation entre les deux femmes, mais également l’angle et l’approche du documentaire.

C’est lors d’une compétition aux Bahamas, en 2018, que tout basculera pour Lu. Alors que la jeune femme tente de battre un record de profondeurs durant l’une de ses plongées, elle suffoquera, perdant le contrôle à des dizaines de mètres sous la surface de l’eau, avant d’être sauvée par l’équipe de sécurité de l’événement. Bien qu’elle s’en tirera somme toute indemne, Jessea gardera tout de même des séquelles de cet événement traumatique, où cette étrange relation entre elle et l’océan, jumelée à la pression de performance et son besoin constant de se dépasser et prouver sa valeur, auront presque eu raison d’elle.

Dès lors, l’objectif du documentaire, dont le processus était déjà amorcé entre les deux femmes, change drastiquement. On explorera d’abord les raisons profondes pouvant amener une athlète à se mettre en danger, puis ce besoin de soutien que lui procurent non seulement les plongeurs l’accompagnant, mais également la réalisatrice du documentaire. Car au-delà d’être le sujet de son film, Jessea Lu prend une place de plus en plus importante dans la vie de la cinéaste, qui l’accompagnera dans son processus de réhabilitation, jusqu’à la suivre à son retour aux Bahamas, dans le lieu où son trauma prit naissance.

7 battements par minute est donc une expérience cinématographique d’une grande profondeur, autant dans le sujet que son traitement. Plusieurs séquences présentant des plongées en apnée de manières quasi-intégrales laissent littéralement le souffle court. Autant les images sont sublimes, autant on peut être choqué du danger auquel s’exposent les plongeurs. Et c’est avec poésie et émerveillement qu’on assiste à ces prouesses surhumaines, découvrant ainsi une personnalité forte, qui se questionne sur les racines de son obsession au fil de son parcours.

Au final, le film est une petite pépite unique, de par son sujet, son traitement, mais surtout la relation inattendue qui se tissera entre la documentariste et l’athlète au fil du processus. Au-delà de la plongée en apnée, il est intéressant de se questionner sur l’évolution de cette dynamique, d’abord professionnelle, puis profondément humaine, qui relie les deux femmes. Car comme un foetus dans le ventre de sa mère, c’est au coeur de l’océan que naîtra cette pureté.

***

Durée : 1h40
Crédit photos : Office national du film du Canada

Vous aimerez aussi

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *