Juste la fin du monde: Pourquoi Xavier Dolan va forcement décevoir cette année
Dans quelques heures, Xavier Dolan fera sa montée des marches en compagnie des comédiens de son dernier film, Juste la fin du monde. L’attention mondiale sera braquée sur eux, le temps de quelques projections, le temps d’une conférence de presse et réapparaitra peut-être le jour de la remise des prix…A moins qu’il ne soit pas appelé.
Triste à dire, mais avec ce nouveau long métrage, il semblerait que le chouchou québécois ait plus à perdre qu’à gagner.
- Le casting
Déjà, forcément le casting. On ne fait que parler de cela depuis des mois. Dolan a réussi à mobiliser la distribution de rêve pour Juste la fin du monde ! Des acteurs demandés par les plus grands réalisateurs mondiaux de la palmée Lea Seydoux à l’oscarisée Marion Cotillard en passant par les césarisés Vincent Cassel et Nathalie Baye sans oublier celui pour qui Dolan doit forcément avoir craqué dans Saint Laurent : Gaspard Ulliel.
Avec un tel casting, il est certain que le moindre faux-pas sera pointé du doigt ! Autre chose qu’un grand film sera forcément une déception….Pression donc !
- Les statistiques
Ajoutons à cela qu’il avait obtenu l’an dernier le Prix du Jury (une sorte de médaille de bronze). La potentialité de gagner mieux cette année (palme ou Grand Prix) parait très difficile. En revanche la chance de faire moins bien (un prix du scénario, ou d’interprétation voir pas de prix du tout) parait beaucoup plus facile ! Rappelons qu’il y a 22 films en compétition et donc 85% de chances de faire moins bien qu’un Prix du Jury !
3.Un langage et des subtilités différentes
Si Mommy avait été à la fois un succès local et international, c’est surtout parce qu’il y existait une vérité brute qui semblait coller à la peau du jeune québécois.
Certes, Dolan dispose d’une richesse culturelle et linguistique qui devrait lui permettre de se mettre à niveau d’une pièce française et non québécoise; Rappelons que Juste la fin du monde est l’adoption cinématographique d’une œuvre écrite par le français Jean Luc Lagarce en 1990. Toutefois, la possibilité de proposer la délicatesse et la subtilité d’un Sautet ou d’un Téchiné semble plutôt hors de portée dans un univers assez opposé au siens…sans parler de la maturité nécessaire pour traiter du sida dans les années 90. Le pari est « casse gueule », le risque grand, très grand….trop grand ?
Juste la fin du monde: crédit photo: Shayne Laverdière
Bien sûr, nous aimerions clairement être surpris (positivement) par un Dolan au changement de ton…mais si Tom à la ferme marquait un changement de registre, il convient d’admettre que ce film n’avait pas bouleversé le public (comme Mommy) ou décontenancé le spectateur (comme J’ai tué ma mère). Sans être mauvais, il restera comme un film plutôt mineur pour le québécois et il serait vraiment triste que l’on dise la même chose de Juste la fin du monde.
Enfin, au regard des premiers extraits, il s’avère que le film semble tirer vers l’émotion voir le larmoyant…certes le beau, peut-être le sublime mais souvent trouver de la justesse dans une thématique lourde et pesante est difficile. Trouver le bon dosage pour être exactement sur le fil des émotions sans trop de pathos, sans trop de lourdeur. Le défi est de taille ! Dolan l’aura-t-il trouvé ? Sera-t-il prêt à défendre un nouveau long métrage ? Dire que c’est le réalisateur le plus attendu au tournant de cette édition 2016 est un euphémisme ! Loach, Almodovar ou encore Assayas n’ont plus rien à prouver et hormis le réalisateur madrilène (qui a connu le lynchage en bonne et due forme pour Les amants passagers), aucun autre réalisateur cette année en lice ne dispose d’une base de fan comme Dolan.
Et plutôt que de se reposer sur des acquis déjà hors du commun, Xavier Dolan (qui vient par ailleurs d’entrer dans le petit Larousse) choisit encore et toujours de relever des défis, de s’atteler à des montagnes sans aucune crainte, sans peur de l’échec. Rien que pour cela, il force indéniablement le respect…que Juste la fin du monde soit réussi ou pas.