Dès son premier film, To have and not Have, Lauren Bacall en impose dans cette adaptation d’Hemingway signé par William Faulkner et Howard Hawks.
Pour commémorer le décès de l’actrice américaine, le FNC a décidé d’inclure dans sa programmation l’un de ces films les plus mythiques. C’est le film des premières pour celle que l’on a surnommée «The Look»: première rencontre avec Bogart, qui deviendra son mari, première rencontre avec William Faulkner et Howard Hawks, le duo qui accouchera deux années plus tard de l’immense chef d’œuvre qu’est de Big Sleep. En fait, tous les principaux artisans de The Big Sleep sont déjà là dans To Have and not Have, Bogie et Bacall devant la caméra, scénario de Faulkner, réalisation de Hawks, Christian Nyby au montage et Sidney Hickox à la caméra.
Cette «répétition» a son charme qui lui est propre et ce charme ce nomme Lauren Bacall. Le film vaut pour elle. Suite au succès de Casablanca en 1942, Jack Warner cherche par tous les moyens à reproduire l’ambiance: temps de guerre, amour, résistance, territoire exotique, etc. Et d’un film à l’autre Humphrey Bogart reprend les traits d’un personnage similaire et les acteurs secondaires sont semblablement les mêmes : Marcel Dalio, Peter Lore, Sydney Greenstreet. Ce suivront Action in the North Atlantic en 1943, Background to Danger également en 1943 (George Raft au lieu de Bogart, mais la recette reste la même), Passage to Marseille en 1944. To Have and Not Have sorti en 1944 mettra une certaine finalité à cette série, c’est aussi celui qui a le plus de ressemblance avec son modèle initial: décors exotiques, territoire français occupé, couple clandestin, résistance, un personnage principal qui voudrait bien ne pas se mêler aux troubles du moment, mais que les événements qui se succèdent le force à agir, un pianiste omniprésent et un film dont la majorité des scènes sont tournées dans un bar et un hôtel.
Au finale, le film sera diamétralement opposé, une seul et unique raison: Bacall. Le film a une légèreté que les autres films du même canevas n’avaient pas. À chaque plan que Bacall est à l’écran, elle a un petit sourire en coin, voulu ou non, cela charme, elle a la désinvolture que le personnage masculin incarne à l’écran. Bogart n’a pas seulement avec Bacall sa meilleure partenaire à l’écran, il fait face à son alter-ego féminin et de façon évidement, Bacall le sait et elle prend plaisir à chacune de ses apparitions à incarner se positionnement. Cela est résumé à merveille dans l’une des dernières répliques du film. Le pianiste du bar, incarné par Hoagy Carmichael, demande à Slim, le personnage qu’incarne Lauren Bacall, «Hey Slim, are you still happy?» et Slim de lui répondre : «What do you think?»