Mickey and the Bear : Se libérer de la bête

États-Unis, 2019
Note : ★★★1/2

Un film initiatique sur le désir d’émancipation d’une jeune femme lors de son passage à l’âge adulte n’a rien de bien original.

Dans Mickey and the Bear, le premier film d’Annabelle Attanasio, 26 ans seulement, l’héroïne provient d’un milieu rural profond du Montana. Elle fréquente un garçon trop ordinaire pour elle et doit s’occuper de son père, un vétéran de guerre, accro aux opioïdes, qui lui demande énormément de temps et d’énergie. Intelligente, elle aspire à un futur dans une université sur la côte Ouest, surtout depuis qu’elle a fait la connaissance d’un confrère de classe anglais, distingué, qui lui aussi désire fuir vers la Californie pour étudier la musique.

À bien des égards, dans la présentation même de l’héroïne et de son attitude, dans son désir de fuite, d’émancipation, dans ses relations avec les autres, dans ses attaches malsaines à son milieu pauvre, le film apparaît comme du déjà-vu, comportant plusieurs enjeux narratifs obligés du genre. Or, même si elle suit des chemins déjà empruntés très souvent dans le cinéma indépendant américain notamment, la jeune réalisatrice insuffle à son récit une sincérité et une authenticité palpables, en plus de s’appuyer sur de superbes performances d’acteurs. Même si on est dans des lieux communs, ceux-ci arrivent quand même à résonner émotionnellement.

Le scénario de ce film d’assez modeste envergure est simple tout en étant nuancé, comportant son lot de petites subtilités qui enrichissent le récit, notamment par des observations relatives au rôle de la femme dans une société patriarcale, aux relations de co-dépendance extrême entre parents et enfants, au syndrome de stress post-traumatique, à l’addiction aux opioïdes ainsi qu’au deuil. Il confère aussi une profondeur psychologique aux deux personnages principaux, la fille et son père, qui forment le cœur du film, tous deux très bien dessinés et surtout merveilleusement bien interprétés.

La jeune Camila Morrone crève l’écran dans le rôle de Mickey, un rôle pour lequel on sent que la réalisatrice, à travers sa lentille, a une grande affection. À ses côtés, dans le rôle du père à l’esprit torturé par le deuil et les violences de la guerre, James Badge Dale tour à tour charme, terrorise, inspire l’empathie et provoque le dégoût. Ensemble, le duo partage des moments intimes parfois tendres, d’autres fois très durs.

Et lorsque la caméra s’éloigne de ses deux héros, qu’elle approche souvent de très près, la capture des émotions étant essentielle à la puissance de l’œuvre, elle filme habilement la municipalité d’Anaconda au Montana de manière à ce que la ville devienne un personnage en elle-même. Et puis les montagnes de la région qui l’entourent deviennent, elles, métaphore des embûches personnelles que doit surmonter Mickey si elle veut quitter la ville et s’extirper de sa condition.

Au final, Mickey and the Bear est un film qui réussit bien ce à quoi il aspire. Il a en effet le potentiel de propulser autant sa réalisatrice que son actrice principale vers un avenir prometteur.

Ce film a été vu dans le cadre du Festival du nouveau cinéma 2019.

Durée: 1h29

 

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