David Lambert vient de sortir son quatrième film, Les Tortues, le 25 mai. À cette occasion, nous avons eu l’opportunité de le rencontrer pour discuter de cette nouvelle œuvre captivante. Un film qui examine avec acuité les dynamiques complexes du mariage, la communication au sein du couple, et la redécouverte de soi à l’âge de la retraite, posant des questions sur la nature changeante de l’amour et du compromis.
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Tout d’abord, votre film m’a beaucoup émue parce que vous proposez une représentation que l’on ne voit jamais à l’écran. On va y revenir un peu plus loin, mais étant donné que je travaille sur l’autoreprésentation, c’est quelque chose qui m’a beaucoup touchée de voir qu’on réussit maintenant à avoir des films avec des représentations beaucoup plus réalistes.
David Lambert : Je suis content que vous releviez ça parce que ça reste quand même une lutte de tous les instants d’arriver à raconter l’histoire de personnages qui sont un tout petit peu spécifiques et qui ne sont pas, j’ai envie de dire, dans la norme et y compris qui ne sont pas des gays dans la norme vue par le prisme hétérosexuel. Je remarque souvent que les personnages gays qui apparaissent au cinéma, ils sont écrits pour plaire à une sorte de public. Et moi, ce n’est pas mon but, c’est-à-dire que j’essaie de trouver des choses universelles et de rendre le film très ouvert à plein de monde. C’est vrai que les personnages ne sont pas des personnages que l’on a déjà vus avant, enfin, j’espère…
(Rires)
Pas du tout ! Au contraire, c’est vraiment une nouvelle représentation ou plutôt une nouvelle représentation de la normalité que vous proposez. Vous défaites aussi des stéréotypes que l’on voit de manière récurrente dans les films. Ce ne sont vraiment pas des personnages typiques qu’on a l’habitude de rencontrer !
DL : Bizarrement, il y a aussi ce truc de classe sociale. Je veux dire, dans Les Tortues, ce sont des personnages de la classe moyenne, avec des problèmes de classe moyenne, des problèmes immobiliers, des problèmes d’argent au moment de leur fonction et de leur retraite. Quand on regarde les personnages gays dans le cinéma, ils sont très souvent, voire tout le temps issus de la bourgeoisie, qui sont dans des milieux très cosy. Ils n’ont jamais beaucoup de problèmes d’argent et sont dans de grands appartements à New York ! Par exemple, le film Supernova est un très beau film sur la fin de vie. Mais le personnage n’a pas des critères de vie normaux et l’ambiance est très feutrée. Moi, ce qui m’intéresse, c’est aussi de faire des personnages qui ont des vies très normales, des personnages qui n’ont pas beaucoup de patrimoines, très semblables aux spectateurs et spectatrices qui regardent le film.
Oui et qui rentrent, peut-être, plus dans un quotidien qu’on connaît tous ?
DL : Ouais, tout à fait.
Quelle a été l’inspiration derrière Les Tortues ? Est-ce que c’était justement cette envie de faire une représentation peut-être plus normale d’un couple gay ?
DL : L’idée de base, c’était que deux hommes avaient bien le droit d’être un vieux couple. C’était le fait que, puisque deux hommes avaient bien le droit de se marier, par définition, ils avaient aussi obtenu le droit d’être un très vieux couple et le droit de divorcer. Mais c’était vraiment cette notion de vieux couple que j’ai voulu retranscrire. Et pour cela, une de mes premières inspirations était le film Le chat de Pierre Granier-Deferre avec Simone Signoret et Jean Gabin.
À un moment, je me suis dit : « mais je vais faire un remake gay du Chat ! » Je veux dire, je vais prendre deux monstres sacrés en termes d’acteurs et je vais faire un couple complètement déchiré. Et puis, Le chat était un film trop cruel, donc j’ai gardé une partie de la cruauté, puis je me suis vraiment plongé dans la comédie de remariage. Ce sous-genre de la comédie romantique qui fait qu’un couple se repose des questions de couple à travers l’épreuve d’un divorce et tout ce qui va avec : est-ce qu’il faut rester ou pas, à quelles conditions, comment vont-ils faire ? Du coup, c’était ça le processus et aussi, quand j’ai commencé à avoir l’idée du film, je me suis demandé comment cela se faisait que ça n’existe toujours pas.
Non, c’est vrai que cela n’existe pas comme film actuellement, enfin maintenant si, avec ton film ! C’est le premier.
(Rires)
DL : Tout à fait, et c’est grâce à ça que j’ai continué à avoir le désir de créer ce film ! J’ai lutté pendant cinq ans pour pouvoir le créer. Il y a toujours des épreuves, des gens qui financent, des gens qui ne financent pas. On arrive à la moitié et on n’a pas tout l’argent, donc il faut réduire les jours de tournage. Il faut aller redémarrer des choses, c’est vraiment très difficile, mais on y arrive hein, même si ça reste quand même difficile. J’ai tenu ce désir en me disant qu’il faut mettre ces personnages à l’écran. Mes personnages s’en sont pris plein la figure pendant toute leur vie. Ils viennent d’une génération dans laquelle ils ont survécu, ils ont survécu à l’homosexualité illégale, à l’homosexualité psychiatrisée, ils ont des couches d’exclusion à travers leur vie. Ce sont des survivants, mais pas seulement d’un événement, de pleins d’événements. Je trouvais ça aussi très émouvant de réaliser un film sur des seniors qui ont traversé tout ça et qui arrivent encore à être de bonne humeur, à se poser des questions amoureuses, à être sur Internet.
J’avais aussi cette volonté de filmer cette génération-là dans les pays où les droits LGBTQIA+ sont quand même davantage respectés que d’autres. Cette génération-là, elle est en train de disparaître et je pense qu’elle est représentative de toute une série de luttes et qu’ils sont les témoins de notre historicité. Ils sont les témoins de là d’où l’on vient parce qu’ils ont vécu des choses. Ça aussi, ça m’a fait tenir le coup sur les difficultés de faire le film.
Oui, bien sûr, c’est clair ! C’est important de les représenter et surtout de les représenter hors des événements, dans une époque actuelle. Est-ce qu’il y a eu beaucoup de difficultés au niveau des financements ? J’imagine que pour certains partenaires, ça a été peut-être compliqué d’imaginer comment déconstruire ces stéréotypes ?
DL : Ça n’a pas été si difficile parce qu’il y a des vrais soutiens directement, mais après c’est comme pour beaucoup de films. Je ne veux pas faire la victime, mais ça reste toujours très compliqué de réaliser un film actuellement avec des sujets qui ne sont pas les sujets les plus rentables financièrement. C’est-à-dire que c’est évidemment plus facile de réaliser un film sur deux mecs de vingt ans qui sont ultra-sexy, qui se passe autour de la plage ou du lac.
Dans un sens qui répondent à des nouveaux stéréotypes, des nouvelles normes sociétales.
DL : C’est triste à dire mais oui, c’est comme ça. Mais moi, j’ai toujours cru en la capacité émotionnelle de mon film et en sa pertinence. Et c’est toujours difficile, je n’ai pas envie de dire que c’est trop difficile parce qu’en même temps, j’ai eu des vrais soutiens de certaines institutions directes et avec enthousiasme. Mais c’est toujours difficile, un parcours du combattant parce que tu dois avoir plusieurs financements. Tu dois aligner les soutiens pour que ça fonctionne. C’est ça qui n’est pas simple.
J’imagine. Tout à l’heure, tu me parlais des comédies de remariage, mais Les Tortues est à la lisière entre les comédies de remariage et le drame. C’est ça aussi qui est beau, c’est de voir comment tu as réussi à manier ces deux aspects et voir comment ils s’entrechoquent. Il y a vraiment des moments où l’on a envie de pleurer dans le film et l’on est très ému et puis d’autres, où l’on retrouve ces traits un peu loufoques des comédies de remariage, où l’on se dit : « ils sont bien vilains entre eux tout de même ! »
(Rires)
DL : Oui, tout à fait ! C’est vrai que j’appuie sur le moment mélo quoi, les vrais moments où il y a de l’émotion, c’est vrai que je rentre dedans… J’aime faire ça, car notre émotion de spectateur ou de spectatrice est ouverte par le rire. On voit que c’est assez facile de rentrer dedans parce qu’on aime les personnages, on les aime tous les deux. Alors, on rentre dans l’émotion et l’on raconte des choses qui concernent tout le monde d’une manière ou d’une autre. Qu’on ait envie d’être à deux ou qu’on ait envie d’être à trois, ça ne change rien, on a envie d’être aimé et l’on a envie de construire quelque chose. Peu importe la forme que cela prend, tout le monde a envie de construire une sorte de foyer, que ce soit même avec un animal de compagnie, ça peut prendre diverses formes. Je ne suis pas en train de faire l’apologie du couple, mais je me demande à quel prix on a envie d’être avec l’autre, qu’est-ce qu’on sacrifie de soi pour être avec quelqu’un, qui que ce soit. Et comment est-ce qu’on arrive à rester soi-même tout en étant dans une bonne relation avec l’autre ? C’est la trajectoire du personnage de Thom jouée par Dave Johns, il s’est oublié. Puis, il fait des démarches pour se réapproprier sa vie et se recentrer puis redevenir indépendant alors qu’il a perdu son indépendance par amour. Du coup, ce film, c’est aussi toutes ces questions, de ce qu’on gagne et de ce qu’on perd pour construire un couple.
Oui, et le thème de l’effacement de soi. Enfin, comme tu le dis avec Thom, on le voit bien, et d’ailleurs, c’est aussi sa reconstruction qui permet le dénouement du film. Finalement, c’est aussi se rendre compte de qui il est lui, avant d’être un couple.
DL : Ouais tout à fait, c’est ça et qu’il doit aimer : sa vie et s’aimer soi-même pour peut-être continuer le couple…
C’est clair… Au début du film, Henri parle très peu. Je crois qu’on est à une ou deux phrases pendant les 20 premières minutes, c’est vraiment très peu. Comment as-tu traité cette absence ? Est-ce que ça t’a aidé à développer le thème et ce qu’il se passe entre les personnages d’avoir un personnage aussi muet ?
DL : D’abord, c’est une vraie volonté ! Sur tous mes films, j’aime beaucoup remplacer des dialogues par du silence et par des gestes, du langage corporel. Sur celui-là, j’ai très fort appuyé dessus en m’inspirant du film Le chat justement dans lequel ils s’envoient des petits mots pour communiquer. Alors que quand ils s’écrivent, ils sont dans la même pièce. Ce silence, il vient de là. Il vient de tenter en début de film d’incarner ce couple et surtout, Henri, qui est dans un moment très charnière de mise à la retraite et dans un moment de fragilité.
Pour moi, ils n’ont pas besoin de se parler, lui en tout cas, n’éprouve pas le besoin de parler. C’est un ours qui ne parle pas et à un moment, il déborde. Il va exprimer ses sentiments et il va l’exprimer dans une très forte émotion. Donc c’est aussi quelqu’un qui apprend à dire, pour essayer de sauver son couple. Donc j’aime bien que ce personnage soit très silencieux et très muet au début, et que petit à petit, confronté à l’épreuve du divorce, il apprenne à exprimer ses sentiments, c’est quelque chose qu’il n’a jamais fait.
Il le fait deux fois, je ne vais pas tout dévoiler, mais il le fait à un moment où Thom ne l’entend pas. Et puis, il le fait au tribunal. Pour avoir cette prise de parole forte, j’avais besoin d’un personnage très mutique au début.
D’accord, et peut-être aussi, que cela parle de cette distance émotionnelle au début du film qu’il y a entre eux. Parce que, même si ils se recentrent tous les deux sur leur couple, au début, ils sont quand même en grande dissonance. L’un veut parler, l’autre non, l’un a besoin de temps, l’autre aimerait aller vite…
DL : Tout à fait, ils sont complètement désynchronisés… Il y en a un qui veut prendre des vacances avec l’autre qui veut rester chez lui. Il y a quelqu’un qui veut parler, l’autre qui veut rester muet, il y a quelqu’un qui veut danser, l’autre qui veut de l’espace. Enfin bon, c’est une somme de quiproquos, ils ne se parlent pas et ils confondent leurs désirs qui ne sont pas compatibles. Ils n’arrivent pas à se poser et à se dire : bon aller, on en parle maintenant…
On va avoir une vraie discussion qui fasse avancer les choses.
DL : Ouais, mais c’est ça aussi les vieux couples, à un moment on n’arrive pas à se parler de la bonne manière. Le truc évolue puis arrive la crise. C’est une crise de couple doublée d’une crise existentielle d’individus. Ça parle de comment on fait pour s’en sortir et d’est-ce qu’on s’en sort d’ailleurs ?
On parlait de dissonance, ils le sont même au niveau de leur stade de vie parce qu’on a l’impression à la fois que Thom est déjà retraité, étant donné l’arrêt de sa carrière de Drag Queen, mais en même temps qu’il est encore en activité de par son activité de brocanteur donc il a une certaine activité. Alors que Henri arrive vraiment dans un vide, une crise de passage à la retraite donc, à la fois, on a l’impression que Thom l’a peut-être déjà connu mais pas entièrement… Enfin, qu’il n’a pas eu ce problème.
Oui Thom et Henri, c’est un peu la cigale et la fourmi. Thom a ce côté cigale qui fait que lorsqu’il a pris sa retraite, il n’avait pas non plus un boulot aussi prenant qu’Henri, aussi mobilisant dans les journées, donc il a toujours été un peu comme ça, dans des choses plus récréatives et qui ont besoin de moins d’adrénaline et d’autoconcentration. Du coup, il a géré ce moment mieux qu’Henri. Ce que je trouve intéressant dans le personnage d’Henri, c’est que c’est quelqu’un qui n’a pas préparé sa retraite, c’est quelqu’un qui va la prendre de plein fouet. Il n’a rien anticipé et je pense que des moments charnières comme ça, ça s’anticipe.
C’est aussi un film sur un moment charnière de la vie, qu’on soit hétéro ou gay, il y a quelques moments comme ça, quand on est parent et qu’on doit laisser les enfants partir, quand on a travaillé 35, 40 ans et qu’on doit laisser le travail partir et imaginer la suite de sa vie. Ce sont quand même des moments que pas mal de gens vivent et qui sont intéressants à filmer et à dramatiser au cinéma.
Là, c’est un thème vraiment universel. L’incertitude de ce qui arrive finalement.
DL : C’est ça, et Thom, lui, n’est plus dans l’anticipation, il l’a vécue et je crois qu’il l’avait déjà anticipée du coup. Et en plus, comme il a déjà traversé ça, il a un peu de longueur d’avance.
C’est ça, mais peut-être pas de la bonne manière non plus. Parce que dans un sens, ce n’est pas ce que Henri recherche ou il ne le vit pas de la même manière du tout.
Dans le film, tu explores le thème du désir de chez les seniors et comment tu as travaillé justement cet aspect qui est vraiment très sous-représenté dans le cinéma. Je pense que c’est le premier film que je vois avec des seniors qui ont un désir, des désirs aussi bien pour eux et pour d’autres hommes. Est-ce que c’était particulièrement dur à mettre à l’écran ? Ou le contraire ?
DL : Moi, ce sont un peu les gens que je connais. Enfin, j’ai 50 ans, je continue à avoir le désir donc je me suis un peu projeté avec 15 ans de plus. Mais y a aussi plein de gens dans mon entourage qui sont des seniors et des seniors gays et qui ont plein de désir. Même chez un couple hétérosexuel, si tu veux, le désir et l’âge ne sont pas très fortement représentés à partir d’un à certains moments. J’ai presque envie de dire que dans le monde hétérosexuel, c’est encore plus injuste avec les femmes. C’est comme si à un moment il n’y avait plus rien, comme si l’on n’avait plus le droit de jouir, d’avoir de la sensualité, d’avoir des caresses ou simplement d’avoir un désir qui vous porte à faire des choses un peu bêtes, à vivre de ce désir et être conditionné par lui.
Je rencontre des gens qui sont complètement éteints dans leur désir à 20 ans et je rencontre des gens qui sont dans un désir ardant à 65 et qui se comportent comme des adolescents. Donc, ça n’a pas été très compliqué, non ? Je savais que c’était parfois un peu scabreux, mais ça a créé aussi de la comédie parce qu’il y a une tendresse à avoir cet âge-là et puis à toujours aller à la piscine et regarder les mecs. Enfin, je ne voulais pas que l’on rit des personnages. Je voulais vraiment qu’on soit avec eux et qu’on ait…
Le bon rire au bon moment, on va dire !
DL : Oui, qu’on rit avec tendresse, tu vois donc franchement ça n’a pas été très compliqué. Enfin, je savais que c’était un tout petit peu transgressif parce que c’est peu représenté. Mais, en même temps, j’avoue qu’il y a un truc que ça m’évoque. Dans mon adolescence, l’insulte suprême, c’était vieux pédé, quoi. C’était vraiment le truc le plus gros, c’était absolument horrible. Pour revenir à la première question, assez tôt, je me suis dit, je vais réaliser un film avec des vieux pédés et transformer l’insulte en des personnages truculents, chouettes, enfin attachants.
Voilà. Tout à fait, attachant. Et du coup, par rapport à la représentation du genre des personnes âgées, est-ce c’était compliqué de les représenter de manière authentique et complexe et de pas tomber dans ces stéréotypes ?
DL : Si tu veux, quand tu réalises un film avec des gens jeunes de 20 ans ou 25 ans, en fait, quand tu filmes, tu sais qu’ils ont des couches, c’est comme un iceberg. C’est-à-dire que tu filmes l’iceberg, tu sais qu’il y a des couches qu’on ne voit pas. Ces couches, quelque part, tu dois les faire ressentir au spectateur, à la spectatrice. Il y a quelque chose qui fait qu’au cinéma on sent ce qui est caché et on sent qu’il y a un truc en dessous qu’on ne voit pas, ça, c’est avec des gens de 20, 25 ans. Avec des personnages de 65, c’est le même principe, mais en fait, les couches sont beaucoup plus fortes.
Du coup, ça rejoint aussi ce que tu disais par rapport aux époques et aux traumas qu’ils ont vécus. Par exemple, dans le film, on voit le spectre des années SIDA qui est encore bien présent dans leur tête, en tout cas, dans leurs souvenirs. Et on comprend que c’est aussi quelque chose qui les attache à leur lieu de vie, à leur quartier.
DL : C’est un film de quartier où ils sont dans une maison qu’ils doivent à un moment, reconsidérée. Et donc, forcément il y a des fantômes, c’est ça…
Y a des fantômes au sein même de leur foyer. C’est d’ailleurs très poignant. J’allais parler de la symbolique des tortues qui est quand même très intéressante, elles ont une carapace, elles vieillissent avec le temps, mais quand même, au sein même du film, elles apportent vraiment une touche d’humour et de vérité sur notre mauvaise foi.
DL : Cette scène est très cocasse, c’est très tendre. « Tu m’as pris ma tortue ? », « Non, ce n’est pas la bonne tortue. » Ça fait partie de mes scènes préférées du film pour le coup.
(Rires)
Oui, on se rend compte que le personnage qu’on pouvait, peut-être, juger un peu de mauvaise foi, finalement, il en a tout autant. Honnêtement, je ne pensais pas que ça allait marcher jusqu’au bout cette situation. Je pensais quand même que l’issue serait différente et c’est ça qui est drôle, c’est totalement vrai, mais ça prouve qu’on a tous un peu de mauvaise foi quand même.
(Rires)
DL : Bah écoute, ça me fait plaisir !
Quel message souhaiterais-tu que les gens retiennent, en fait, en allant voir Les Tortues, quelque chose à propos de la représentation ou autre chose de plus général ?
DL : J’aimerais bien que les gens arrivent à s’aimer l’un l’autre. C’est difficile de s’aimer l’un l’autre et le film parle de s’aimer dans un couple. Ça a l’air très basique comme ça, mais je pense qu’à partir du moment où tu peux commencer à aimer quelqu’un dans un couple et en duo, tu peux peut-être commencer à aimer quelqu’un dans un trio, dans un quatuor, dans une famille, dans une société, et cetera. Donc moi, c’est ça que j’aimerais que les gens soient à l’écoute de qui est en face d’eux et qu’on arrive à coexister.
C’est vrai que je suis très content, moi, quand j’ai des personnes qui sont quasiment des personnages et qui viennent soit en larmes soit les larmes aux yeux et qui ont enfin un film pour eux. Si je peux contribuer à aider les gens à être mieux à deux ou même à être mieux seul pour être mieux à deux après, ça, c’est cool.
De communiquer et d’écouter l’autre en face et de ne pas se tenir sa vision.
DL : C’est aussi un film sur le fait qu’il ne faut pas fantasmer l’autre, il faut tenter de le voir et d’écouter comme il est. Et puis après, de faire avec ou pas parce que quand on connaît l’autre, on peut ne pas faire avec, ça, ce n’est pas le problème. C’est un peu ça le message du film.
Je trouve que quand les films se revendiquent trop politiques, en fait, ils ne le sont jamais. Donc j’essaie de faire des films modestes et humbles qui représentent des gens qu’on ne voit jamais et qui, à un moment, créent des messages. Ce ne sont pas des messages subliminaux, mais oui, le film en amène quand même.
Oui, bien que ton discours ne soit pas politisé dans le film, c’est quand même un discours d’inclusion.
Oui, c’est ça, c’est une vraie remise en question de l’institution du mariage pour ces personnages-là. Enfin, je ne veux pas remettre en question l’institution du mariage dans l’histoire des luttes LGBTQIA+, c’est un énorme pas évidemment, c’est un jalon dans nos libertés. Mais, qu’est-ce qu’on fait avec ça
Oui puis, là encore, tu le normalises. Le divorce arrive avec j’ai envie de dire, c’est obligatoire. Je crois que c’était ma dernière question. Je trouve ça vraiment génial de voir une nouvelle représentation qui n’est justement pas stéréotypée où tout le monde peut se sentir concerné par le message du film.
DL : Merci beaucoup !
Merci à toi d’avoir accepté cet entretien !
Durée : 1h23
Les Tortues est actuellement en salle au Québec.