Australie, 2013
Note:★★★★
Ça commence un 23 août et un an plus tard, jour pour jour, leur vie changera.
Tel est le point de départ de 52 Tuesdays racontant l’histoire de Billie, 16 ans, qui voit son adolescence s’étioler lorsque sa mère, Jane, lui fait part de son besoin de changer de sexe. Désireuse de passer du temps pour elle afin de finaliser sa transformation en homme et d’évoluer à son rythme sans regard extérieur, cette dernière confie la garde de sa fille à son père mais lui propose de passer tous les mardis après-midi en sa compagnie pendant un an pour garder le lien.
Filmé style caméra à l’épaule durant 52 semaines à la manière de Boyhood, une vérité certaine se dégage de cette œuvre aux aspects très documentaires puisant ainsi dans sa forme toute sa force. De fait, l’utilisation de cartons datant chaque mardi fait office de ponctuation et permet le découpage du film en scènes de la vie de tous les jours (partie de tennis, conversation sur le canapé familial). De plus, ils sont accompagnés du tic-tac d’une montre qui suggère le temps qui passe et que chaque instant est à vivre au présent. Le compte à rebours est alors commencé.
Cette année là sera décisive pour la mère que l’on verra évoluer physiquement et dont on ne connaîtra jamais les motivations d’un tel choix: c’est tant mieux. La réalisatrice ne tente pas de nous donner des réponses. Sa caméra n’est pas non plus dans le jugement. Elle se questionne juste, tout comme Billie qui se filme et expérimente, à sa manière, son corps de jeune adolescente. Alors que Jane opère un changement radical pour devenir un homme et cherche en elle une stabilité émotionnelle, Billie elle aussi est en période transitoire mais pour devenir une femme (écoulement des règles, premiers émois amoureux).
Apparaissant au début, compréhensive, très ouverte sur le monde (elle enverra une vidéo d’une fille de transgenre pour témoigner son amour à sa mère), elle cherchera à s’émanciper de celle-ci très vite obnubilée par sa caméra qui lui servira de journal intime. Dès lors, elle fera la rencontre d’un couple avec qui elle se cherchera sexuellement mêlant vidéos, fantasmes et perversion sans jamais tomber dans le voyeurisme avec toujours l’envie d’apprendre et d’étancher sa soif de connaissance. Il est plus facile pour elle de laisser parler son corps plutôt que ses émotions, on est dans le non verbal. Jane aussi se filme pour garder une trace de son évolution physique (musculature, chevelure), Billie ne fait alors que reproduire le schéma parental à la recherche de moments authentiques. Le film pose alors la question de la communication dans une société ou les technologies modernes sont omniprésentes. Et même s’il y a beaucoup d’amour entre elles deux, c’est quand Jane fera face à ses premières difficultés hormonales que Billie la confrontera comme si elle cherchait à se construire dans l’adversité. Une sensation de douce violence nous envahit alors tout au long du visionnage du film qui mêle réalité poétique et parcours initiatique. Cinquante deuxième mardi, le temps se suspend. Un an s’est écoulé déjà et l’impression que l’on a partagé plus que du cinéma.
Auteur: Alexandre Blasquez
Durée: 1h54